« i El Estado opresor es un macho violador! » Violences de genre perpétuées par l’Etat à l’épreuve des protestations sociales en Colombie 

Temps de lecture : 11 minutes

« i El Estado opresor es un macho violador! » Violences de genre perpétuées par l’Etat à l’épreuve des protestations sociales en Colombie 

05.09.2021

Pauline Marquis

Allison, Maria Jovita, Angie Johanna, Julia[1]Liste des victimes d’homicide lors de la grève nationale en Colombie, 28/05/2021, http://www.indepaz.org.co/victimas-de-violencia-homicida-en-el-marco-del-paro-nacional/… victimes de violence policière, ont perdu la vie dans le «Paro Nacional[2]« Grève Nationale » » qui se tient actuellement dans plusieurs villes de Colombie. Depuis le 28 avril dernier, et aujourd’hui encore, les rues colombiennes sont bouleversées par plus d’un mois d’affrontement entre un peuple épuisé, désireux de faire entendre sa voix et respecter ses droits fondamentaux, et un gouvernement répressif.

Abus de pouvoir, violences policières, massacres, agressions sexuelles, violations des droits humains ; la terrible situation à travers le pays est qualifiée de terrorisme d’État par les manifestant.e.s. À l’ombre de cette conjoncture, nous porterons un regard attentif sur la condition des femmes*[3]La conception du genre est, bien sûr, beaucoup plus complexe et riche que la simple division homme/femme. Cet article se basera sur la conceptualisation binaire du genre en tant que dichotomie … Continue reading pour tenter de comprendre pourquoi elles sont les premières mises à l’épreuve dans le brûlant contexte des protestations.

La Colombie est marquée par un long conflit socio-politique entre le gouvernement, les groupes paramilitaires et les groupes guérilleros révolutionnaires qui a forgé une société de violence structurelle. Le pays a connu ces dernières années certaines avancées législatives et une croissance économique favorisant sa stabilité, qui peuvent être attribués à la forte culture de mobilisation civile pour la paix et la transformation non-violente des conflits. Au milieu des années 1990, on estimait qu’au moins 50 millions de Colombien.ne.s avaient été mobilisé.e.s dans différentes initiatives de paix[4]Serrano Amaya, J.F, Armed Conflict and Sexual Para-Politics in Colombia, Homophobic Violence in Armed Conflict and Political Transition, Global Queer Politics, 2018, p:30.

Le 1er décembre 2016 est entré en vigueur un accord de paix saillant conclu entre le gouvernement colombien de Juan Manuel Santos et la guérilla des FARC-EP[5]Forces armées révolutionnaires de Colombie – Armée du Peuple (FARC-AP) étaient la principale guérilla communiste impliquée dans le conflit armé colombien, mettant fin à plus d’un demi-siècle de conflit armé. La brutalité du conflit social a établi les codes politiques de violence sexuelle et de genre de la société colombienne en plaçant de nombreuses femmes comme victimes de première ligne de ces affrontements armés et leur assignant une responsabilité toute particulière dans la construction de la paix[6]Andrade Salazar, José Alonso, Alvis Barranco, Libia, Jiménez Ruiz, Luz Karine, Redondo Marín, Miladys Paola, Rodríguez González, Lida, « La vulnerabilidad de la mujer en la guerra y su papel en … Continue reading.

Placées dans un scénario de vulnérabilité indéniable et soumises à toutes les formes de violence sexiste et sexuelle, les femmes colombiennes font quotidiennement face au viol, à l’esclavage sexuel, à l’instrumentalisation de leur corps, à la torture, à l’humiliation publique et à l’exploitation économique[7]Serrano Amaya, J.F. 2018.

« ¡No a la reforma tributaria![8]« Non à la réforme fiscale ! » »

L’élément déclencheur des révoltes, révélatrices du « ras-le-bol » général de la population, a été le projet de loi néolibérale et patriarcale du gouvernement de droite d’Iván Duque, déconnecté de la réalité du pays. Le comité national de grève colombien a immédiatement soutenu les premières tentatives de protestations et lancé un appel à l’action dans différentes régions du pays « pour la vie, la paix, la démocratie et contre la réforme fiscale[9]https://twitter.com/cutcolombia/status/1387581183022796802?s=20 ».

Durant la pandémie, justifiant la mise en œuvre de toutes les réformes fiscales, prétendant couvrir l’impact économique de la crise sanitaire, le gouvernement a déclaré la guerre contre les Colombien.ne.s les plus défavorisé.e.s.

La réforme en question, « loi de solidarité durable », déposée le 5 avril 2021, aurait pour but d’augmenter la collecte fiscale de l’État en supprimant de nombreuses exonérations dont bénéficiaient les ménages et entreprises. En augmentant, entre autres, la TVA sur les services publics et les biens de base, l’État entendait récolter environ 6 milliards de dollars supplémentaires entre 2022 et 2031[10]France 24, « En Colombie, manifestations massives contre la réforme fiscale malgré le Covid-19 », 29/04/2021 … Continue reading.

Ces changements fiscaux, visant à prendre aux citoyen.ne.s plutôt qu’à se tourner vers la résolution des problèmes de corruption des élites, affecteraient grandement les classes moyennes et populaires, dont la situation est devenue encore plus précaire dans le contexte de la pandémie. La Colombie continue de souffrir de l’un des taux d’inégalité les plus élevés du monde. En 2020, 42,5 % de la population se trouvait en dessous du seuil de pauvreté[11]Incidences de la pauvreté monétaire selon le profil du.de la chef.fe de ménage, selon les chiffres du Département administratif national des statistiques … Continue reading et plus d’un quart de la population vivait avec moins de deux euros par jour[12]Yves Bourdillon, « Retrait d’une réforme fiscale contestée en Colombie », Les Échos, 03/05/2021, … Continue reading.

En prime d’avoir un impact direct sur les classes plus vulnérables, l’économie féministe démontre que les réformes fiscales ont un impact différencié sur les femmes et les hommes. La féministe Lola Olufemi affirme que « lorsque les gouvernements mettent en œuvre de violentes politiques d’austérité pour « équilibrer le budget », ce sont les femmes qui sont le plus durement touchées.[13]Lola Olufemi, 2020, Feminism, interrupted: Disrupting Power»

Dans le cadre colombien, la pauvreté frappe plus lourdement les femmes. En 2020, « la pauvreté a une incidence de 46,7 % dans les ménages dirigés par des femmes, face à 40,1 % dans ceux dirigés par des hommes »[14]DANE, 2021 .

Le projet de réforme fiscale proposait une augmentation des prix des dépenses inévitables pour le travail domestique ou les soins, qui, en raison des rôles sexospécifiques façonnant la société colombienne, sont des dépenses priorisées par les femmes. La réforme visait encore l’augmentation des prix des produits menstruels ; à ce sujet, Natalia Moreno parle « d’asphyxie des poches des femmes[15]Natalia Moreno Salamanca, «Avec la réforme fiscale, être une femme coûte plus cher en Colombie», 2018, https://cerosetenta.uniandes.edu.co/ser-mujer-en-colombia-es-mas-caro/» et affirme qu’elles sont soumises à des impôts sexistes et à l’utilisation de produits plus chers simplement parce qu’ils sont « pink line[16]Natalia Moreno Salamanca, 2018.« Le rayon rose » fait référence aux produits du commerce stéréotypèrent conçus et mis en vente pour le public féminin ».

« ¡El paro no para ![17]« La grève ne cesse pas ! »»

Le 2 mai, soit après cinq jours de manifestation, le Président Duque a annoncé le retrait de la réforme controversée, avec l’intention de soumettre au plus vite un nouveau projet de réforme fiscale au Congrès. Malgré l’abandon du projet qui a mobilisé la population colombienne dans les rues, la protestation sociale a continué de plus belle dans les principales villes du pays (notamment à Cali, l’épicentre des manifestations et à Bogotá, la capitale).

Gustavo Bolívar, membre du parlement colombien, affirme que, quand bien même le Président ait fini par retirer la réforme, « son entêtement a coûté de nombreuses vies et blessures aux citoyens[18]https://twitter.com/GustavoBolivar/status/1388909373171412993 ».

Le cri collectif continue alors à s’élever contre de nombreux types d’injustices de longue date dont est victime la population colombienne. Les citoyen.ne.s exigent des changements législatifs profonds pour rendre la société plus égalitaire (réforme de la santé, réforme de l’éducation, réforme environnementale, réforme de la police, meilleure application des accords de paix etc.).

« ¡Nos queremos vivas ![19]« Nous voulons être en vie ! » »

Les protestations sont marquées par la répression brutale des forces de police, qui a fait de nombreux.euses mort.e.s, des milliers de blessé.e.s et des centaines de disparu.e.s.

Durant le premier mois de protestations sociales en Colombie, l’ONG de défense des droits humains Temblores, a rapporté 3 405 cas de violences policières, dont 43 meurtres, 175 cas de coups de feu, 1 133 victimes de violences physiques, 1 445 arrestations arbitraires, 648 interventions violentes, 47 victimes d’agressions oculaires et 22 victimes de violences sexuelles (dont 74 % sont des femmes) par les forces publiques, bien souvent en groupe[20]ONG Temblores, « Communiqué à l’intention de l’opinion publique et de la communauté internationale concernant les actes de violence policière au cours du premier mois des … Continue reading.

L’ONG précise que les chiffres rapportés peuvent ne pas correspondre au nombre total d’actes de violence sexuelle perpétrés, dans le sens où ce type de violence est largement sous-déclaré, « en raison de la revictimisation[21]La revictimisation est la réponse du système judiciaire amenant une victime à revivre la situation traumatique comme coupable du crime qu’elle dénonce, de l’inaccessibilité du système judiciaire, de la peur des représailles des auteurs et du silence social et culturel des victimes[22]ONG Temblores, « Communiqué à l’attention de l’opinion publique et de la communauté internationale concernant les actes de violence sexuelle et sexiste commis par la Police Nationale … Continue reading ».

Bien qu’ils existent, les chiffres officiels établis par le gouvernement sont loin d’être fiables, à l’image des informations divulguées par les médias nationaux, ils légitiment le rôle des élites et des politicien.ne.s corrompus.

En Colombie, où tous les dix jours se produit un acte de violence sexuelle dont l’auteur est un policier, on constate qu’en un mois de grève nationale, ces agressions ont été multipliées par sept[23]ONG Temblores, communiqué du 19/05/2021. Les ONG sont notamment préoccupées par les cas de déshabillage forcé, de fouille invasive, d’usage excessif de la force, de harcèlement sexuel verbal et physique, d’attouchement, de viol, de commentaire sexiste sur la résolution du problème en échange de faveurs sexuelles[24]Ita María, «¿Qué está pasando en Colombia?», Revista Volcánicas, 04/05/2021, https://volcanicas.com/que-esta-pasando-en-colombia.

Une analyse intersectionnelle des dynamiques de répression et de la violence sexuelle exercées par les forces de l’ordre dans le cadre des manifestations, souligne la persécution particulière des communautés autochtones, afro-colombiennes, paysannes, des femmes, et des diversités sexuelles et de genre[25]Carolina Rodríguez Mayo, «El paro debe ser antirracista», Revista Volcanicas, 20/05/2021, https://volcanicas.com/el-paro-debe-ser-antirracista/.

«¡El gobierno nos está matando![26]« Le gouvernement nous tue ! » »

La répression et l’usage abusif de la force en réponse aux protestations sociales s’apparentent à une déclaration de guerre interne du gouvernement. Le 1er mai, le Président Duque a ordonné la militarisation des rues, « pour soutenir le travail de la police nationale[27]https://www.youtube.com/watch?v=rWmRCML9jcs » là où la résistance des citoyen.ne.s était la plus marquée.

 L’escadron mobile anti-émeute (ESMAD), unité spéciale de la police nationale colombienne chargée de la sécurité citoyenne, déployée sur ordre du gouvernement, est responsable de la grande majorité des agressions signalées dans les manifestations.

L’action belliqueuse de la police a été incitée par l’ex-président de la République Álvaro Uribe, dont Iván Duque est le dauphin. Le leader politique s’est adonné à la « glorification de la violence[28]Abel Alvarado, « Uribe critique Twitter pour avoir supprimé l’un de ses tweets », CNN, 30/04/2021, https://cnnespanol.cnn.com/2021/04/30/uribe-twitter-protestas-colombia-orix/ » à travers son tweet prônant « le droit des soldats et des policiers à utiliser leurs armes pour défendre leur intégrité et pour défendre les personnes et les biens contre l’action criminelle du terrorisme[29]https://twitter.com/QuinteroCalle/status/1388168455749316611 ». Il recourt ici à la tendance de l’extrême droite d’affubler de « terrorisme » la résistance des civil.e.s majoritairement non armé.e.s pour leurs droits et libertés, afin de justifier le déploiement meurtrier de la police.

Refusant de reconnaître les violences policières, Iván Duque a souligné « l’intérêt criminel évident [des manifestant.e.s] à affecter et à saboter l’économie[30]https://www.youtube.com/watch?v=lb_2a1XrCbI». Face aux demandes de la population de démilitariser les villes, il a annoncé, le 17 mai, l’instruction « à tous les niveaux de forces publiques de l’ordre de déployer leurs capacités opérationnelles maximales[31]https://www.youtube.com/watch?v=lb_2a1XrCbI ».

Au-delà de cette situation de violence dramatique au sein des protestations, le gouvernement a orchestré des attaques contre le personnel médical chargé de soigner les blessé.e.s, et le ministre de la Santé a annoncé l’interruption du programme de vaccination contre le Covid-19 à Cali, ville principale du conflit, comme une forme supplémentaire de pression contre les manifestant.e.s[32]Natalia Hernández y Adriana Villarreal, «Revuelta popular en Colombia: la represión del gobierno y las masacres no frenan las protestas», Revista amazonas, 06/05/2021 … Continue reading. Ce phénomène de frénésie des autorités fait écho au « nettoyage social[33]ONU Derechos Humanos Colombia, « El informe que desnuda la « limpieza social » en Colombia », 20/04/2016 … Continue reading», mené principalement par les groupes paramilitaires et les forces de sécurité colombiennes depuis les années 1980, qui désigne l’action de tuer des personnes considérées comme « indésirables[34]Centro Nacional de Memoria Histórica, Limpieza social, una violencia mal nombrada, Bogotá, IEPRI, 2015» justifiée par l’argument d’assurer la sécurité de la population.

Les ONG[35]Temblores et Pares montrent que la transgression de certains corps, en particulier des corps féminins et féminisés, est devenue une politique de répression et de correction de l’État. Les cas de violences sexuelles enregistrés ne correspondent pas à l’action abusive de certains agents policiers, mais bien à une pratique qui fait partie de l’institution[36]ONG Temblores, communiqué du 19/05/2021. Le taux d’impunité des cas de violences sexuelles en Colombie est de 90 %[37]Rapport, La guerre inscrite dans le corps, Centro Nacional de Memoria Histórica, 2017, ceci conforte l’idée que l’État est le premier complice de l’atteinte portée à l’intégrité des femmes qui occupent les espaces publics. Serrano Amayasigne la conduite du gouvernement colombien comme la « para-politique sexuelle[38]Serrano Amaya, J.F. 2018», pour illustrer les interactions entre la violence sociopolitique paramilitaire et les ordres sexuels et de genre. Elle explique que les groupes armés interviennent dans la politique de genre et de sexualité pour contrôler la vie des colombien.nne.s et notamment « des sujets genrés et sexualisés particuliers[39]Serrano Amaya, J.F. 2018» par le biais de la violence et de menaces collectives.

«¡El futuro será feminista o no será![40]« L’avenir sera féministe ou ne sera pas ! » »

Les protestations sociales contre l’oppression du gouvernement ont grandement été portées par l’organisation pacifiste des groupes féministes. Il est primordial d’écouter les voix de ces femmes qui sortent de leurs rôles de passivité sociale traditionnellement assignés par la domination patriarcale, pour construire un futur juste et en paix. L’histoire du continent témoigne que les mouvements de femmes latino-américaines ont inscrit les questions d’égalité des sexes au sein de l’agenda politique et ainsi joué un rôle important dans les transitions démocratiques[41]Jane S. Jaquette, Feminist Agendas and Democracy in Latin America, Duke University Press, 2009. En Colombie, on pense notamment aux premières grèves féministes dans l’industrie du textile menée par la leadeuse syndicaliste Betsabé Espinosa[42]Ricardo Aricapa, « Betsabé Espinal, pionera de la lucha de las mujeres por derechos laborales: un suceso poco conocido en la historia de Colombia »,  08/03/2017: … Continue reading dans les années 1920 qui ont permis une amélioration des conditions de travail, ou encore à la lutte pour le droit de vote des femmes qui a été consacré en 1957.

À présent, les groupes féministes récupèrent la pleine possession de leurs corps par le recours alternatif à l’art comme mode de résistance et de transformation. De la sorte, face aux actes meurtriers du gouvernement et suivant le schéma de la reconstruction des villes post-conflit armé, les manifestations sont rythmées par la musique, la danse[43]https://www.instagram.com/p/CPk8i_bHF4L/, le théâtre, le dessin, etc.

À l’aube des révoltes, la puissante action menée par des membres de la communauté LGBTI+ sur la place nationale de Bogotá a donné le ton aux mobilisations. Axis, Nova et Piisciis, de leurs noms de scène, trois artistes transgenres, dansaient au milieu des policiers et ont déclaré que « l’art est l’arme qui a le plus de pouvoir face à la haine et la violence[44]https://www.youtube.com/watch?v=2cJptrzYiWs ».

Les problèmes économiques, sociaux et politiques que traverse le pays, affectent davantage les « minorités de genres », en ce qu’elles manquent le plus de visibilité, de droits et de soutien. La violence contre la communauté LGBTI+ et les personnes non-binaires est utilisée comme une stratégie de guerre et « un moyen de contrôler les populations dans les zones de conflit par la fabrication d’un ennemi au sein de la communauté.[45]Serrano Amaya, J.F. 2018 »

« ¡SOS COLOMBIA! »

Certains organismes de la communauté internationale (telles que la Commission interaméricaine des droits humains- CIDH[46]http://www.oas.org/es/CIDH/jsForm/?File=/es/cidh/prensa/comunicados/2021/137.asp, ou la Fondation internationale pour les droits humains- FIDH[47]https://fundacion.in/press20210529es.pdf) ont entendu les appels au secours des manifestant.e.s  colombien.ne.s et ont exprimé leur préoccupation quant à la gravité des violations de droits humains qui ont eu lieu dans le cadre de la grève nationale. Les normes internationales en matière de droits humains disposent que la police ne doit recourir à l’usage de la force lors des manifestations qu’en dernier recours et respectant les « principes de légalité, de nécessité, de proportionnalité et de responsabilité[48]https://fundacion.in/press20210529es.pdf ». Selon Amnesty International, le recours à la force pour maintenir l’ordre dans une situation qui ne constitue pas une « menace concrète pour la vie ou l’intégrité physique de tiers[49]Amnesty Internationale, « Colombia: Preocupan las denuncias de desapariciones y violencia sexual contra manifestantes», 07/05/2021, … Continue reading», comme c’est le cas en Colombie, est considéré comme un « usage disproportionné de la force, et donc, contraire aux normes internationales[50]Amnesty Internationale, 07/05/2021, ».

De plus, selon la Cour interaméricaine des droits humains, la violence sexuelle est de la « torture » lorsqu’elle est commise par un fonctionnaire ou lorsqu’un fonctionnaire donne l’ordre d’intimider, de dégrader, d’humilier et de punir la victime[51]CIDH, Affaire Rosendo Cantú et al. c. Mexique, 2011, 26, p:9 :https://corteidh.or.cr/docs/casos/articulos/seriec_225_esp.pdf. Il est incontestable que les violences sexuelles perpétrées par les forces de l’ordre et les autorités en Colombie sont des crimes de droit international et qui doivent faire l’objet d’enquêtes, pour garantir justice, vérité et réparation à la population.

La FIDH exige alors que le Président Iván Duque ordonne la fin de la répression policière contre son peuple et demande un mandat d’arrêt international contre le président de la République et les autres personnes responsables de violations des droits humains en Colombie (ministre de la Défense, ministre de la Justice et du Droit, directeurs de la police colombienne…)[52]https://fundacion.in/press20210529es.pdf.

Conclusion

Depuis plus d’un moise quotidien dans environ 70 % des villes et villages en Colombie[53]Patrick Bèle, « La Colombie sombre dans un grave chaos social, Le Figaro, 06/05/2021 est rythmé par les virulentes manifestations. Il apparaît que le caractère décentralisé et parfois non coordonné des revendications puisse rendre difficile la formulation d’objectifs politiques communs entre les manifestant.e.s. De manière générale, il ne semble pas que les mobilisations s’arrêteront tant que le gouvernement ne s’engagera pas à apporter une refonte politique et réellement démocratique respectant la voix de chaque Colombien.ne ainsi que la réparation des violations des droits humains dont les forces publiques sont responsables.

Cette situation de violence sexuelle systématique employée comme pratique de domination, de punition et de correction par les agents de police à l’égard des corps féminins et féminisés a montré qu’une réforme de la police axée sur le genre est urgente.

Pour citer cet article : Pauline Marquis, “« ¡El Estado opresor es un macho violador![54]« L’État oppresseur est un violeur masculin », à l’instar des autres titres de cet article, il s’agit d’un slogan phare des protestations féministes en Amérique Latine » Violences de genre perpétuées par l’État à l’épreuve des protestations sociales en Colombie ”, 05.09.2021, Institut du Genre en Géopolitique.

Les propos contenus dans cet article n’engagent que l’auteur.ice.

References

References
1 Liste des victimes d’homicide lors de la grève nationale en Colombie, 28/05/2021, http://www.indepaz.org.co/victimas-de-violencia-homicida-en-el-marco-del-paro-nacional/
2 « Grève Nationale »
3 La conception du genre est, bien sûr, beaucoup plus complexe et riche que la simple division homme/femme. Cet article se basera sur la conceptualisation binaire du genre en tant que dichotomie socialement construite qui structure les relations de pouvoir et la subordination d’un sexe à l’autre.
4 Serrano Amaya, J.F, Armed Conflict and Sexual Para-Politics in Colombia, Homophobic Violence in Armed Conflict and Political Transition, Global Queer Politics, 2018, p:30
5 Forces armées révolutionnaires de Colombie – Armée du Peuple (FARC-AP) étaient la principale guérilla communiste impliquée dans le conflit armé colombien
6 Andrade Salazar, José Alonso, Alvis Barranco, Libia, Jiménez Ruiz, Luz Karine, Redondo Marín, Miladys Paola, Rodríguez González, Lida, « La vulnerabilidad de la mujer en la guerra y su papel en el posconflicto », 2017, p: 290-308 https://www.redalyc.org/articulo.oa?id=407755355018
7, 38, 39, 45 Serrano Amaya, J.F. 2018
8 « Non à la réforme fiscale ! »
9 https://twitter.com/cutcolombia/status/1387581183022796802?s=20
10 France 24, « En Colombie, manifestations massives contre la réforme fiscale malgré le Covid-19 », 29/04/2021 https://www.france24.com/fr/amériques/20210429-manifestations-massives-en-colombie-contre-la-réforme-fiscale-malgré-le-covid
11 Incidences de la pauvreté monétaire selon le profil du.de la chef.fe de ménage, selon les chiffres du Département administratif national des statistiques (DANEhttps://www.dane.gov.co/files/investigaciones/condiciones_vida/pobreza/2020/Presentacion-pobreza-monetaria_2020.pdf
12 Yves Bourdillon, « Retrait d’une réforme fiscale contestée en Colombie », Les Échos, 03/05/2021, https://www.lesechos.fr/monde/ameriques/retrait-dune-reforme-fiscale-contestee-en-colombie-1311913
13 Lola Olufemi, 2020, Feminism, interrupted: Disrupting Power»
14 DANE, 2021
15 Natalia Moreno Salamanca, «Avec la réforme fiscale, être une femme coûte plus cher en Colombie», 2018, https://cerosetenta.uniandes.edu.co/ser-mujer-en-colombia-es-mas-caro/
16 Natalia Moreno Salamanca, 2018.« Le rayon rose » fait référence aux produits du commerce stéréotypèrent conçus et mis en vente pour le public féminin
17 « La grève ne cesse pas ! »
18 https://twitter.com/GustavoBolivar/status/1388909373171412993
19 « Nous voulons être en vie ! »
20 ONG Temblores, « Communiqué à l’intention de l’opinion publique et de la communauté internationale concernant les actes de violence policière au cours du premier mois des mobilisations dans le cadre de la Grève nationale. » 28/05/2021, https://www.temblores.org/comunicados
21 La revictimisation est la réponse du système judiciaire amenant une victime à revivre la situation traumatique comme coupable du crime qu’elle dénonce
22 ONG Temblores, « Communiqué à l’attention de l’opinion publique et de la communauté internationale concernant les actes de violence sexuelle et sexiste commis par la Police Nationale de Colombie dans le cadre des mobilisations de la Grève Nationale », 19/05/2021, https://4ed5c6d6-a3c0-4a68-8191-92ab5d1ca365.filesusr.com/ugd/7bbd97_268c64abead041f4b01d68faa0ec3988.pdf
23, 36 ONG Temblores, communiqué du 19/05/2021
24 Ita María, «¿Qué está pasando en Colombia?», Revista Volcánicas, 04/05/2021, https://volcanicas.com/que-esta-pasando-en-colombia
25 Carolina Rodríguez Mayo, «El paro debe ser antirracista», Revista Volcanicas, 20/05/2021, https://volcanicas.com/el-paro-debe-ser-antirracista/
26 « Le gouvernement nous tue ! »
27 https://www.youtube.com/watch?v=rWmRCML9jcs
28 Abel Alvarado, « Uribe critique Twitter pour avoir supprimé l’un de ses tweets », CNN, 30/04/2021, https://cnnespanol.cnn.com/2021/04/30/uribe-twitter-protestas-colombia-orix/
29 https://twitter.com/QuinteroCalle/status/1388168455749316611
30, 31 https://www.youtube.com/watch?v=lb_2a1XrCbI
32 Natalia Hernández y Adriana Villarreal, «Revuelta popular en Colombia: la represión del gobierno y las masacres no frenan las protestas», Revista amazonas, 06/05/2021 https://www.revistaamazonas.com/2021/05/06/revuelta-popular-en-colombia-la-represion-del-gobierno-y-las-masacres-no-frenan-las-protestas/
33 ONU Derechos Humanos Colombia, « El informe que desnuda la « limpieza social » en Colombia », 20/04/2016 https://www.hchr.org.co/index.php/compilacion-de-noticias/73-conflicto-armado/7679-el-informe-que-desnuda-la-limpieza-social-en-colombia
34 Centro Nacional de Memoria Histórica, Limpieza social, una violencia mal nombrada, Bogotá, IEPRI, 2015
35 Temblores et Pares
37 Rapport, La guerre inscrite dans le corps, Centro Nacional de Memoria Histórica, 2017
40 « L’avenir sera féministe ou ne sera pas ! »
41 Jane S. Jaquette, Feminist Agendas and Democracy in Latin America, Duke University Press, 2009
42 Ricardo Aricapa, « Betsabé Espinal, pionera de la lucha de las mujeres por derechos laborales: un suceso poco conocido en la historia de Colombia »,  08/03/2017:  https://ail.ens.org.co/cronicas/betsabe-espinal-pionera-la-lucha-las-mujeres-derechos-laborales-suceso-poco-conocido-la-historia-colombia/
43 https://www.instagram.com/p/CPk8i_bHF4L/
44 https://www.youtube.com/watch?v=2cJptrzYiWs
46 http://www.oas.org/es/CIDH/jsForm/?File=/es/cidh/prensa/comunicados/2021/137.asp
47, 48, 52 https://fundacion.in/press20210529es.pdf
49 Amnesty Internationale, « Colombia: Preocupan las denuncias de desapariciones y violencia sexual contra manifestantes», 07/05/2021, https://www.amnesty.org/es/latest/news/2021/05/colombia-preocupan-las-denuncias-de-desapariciones-y-violencia-sexual-contra-manifestantes/
50 Amnesty Internationale, 07/05/2021,
51 CIDH, Affaire Rosendo Cantú et al. c. Mexique, 2011, 26, p:9 :https://corteidh.or.cr/docs/casos/articulos/seriec_225_esp.pdf
53 Patrick Bèle, « La Colombie sombre dans un grave chaos social, Le Figaro, 06/05/2021
54 « L’État oppresseur est un violeur masculin », à l’instar des autres titres de cet article, il s’agit d’un slogan phare des protestations féministes en Amérique Latine