La politique étrangère féministe : vers un changement structurel au profit de l’égalité de genre ? 

24/04/2023

Cassandre Impagliazzo

Alors même que, dans le contexte géopolitique actuel, les femmes sont de plus en plus impactées par les guerres et le changement climatique, elles sont également bien moins intégrées aux efforts de paix ou de lutte pour la protection de l’environnement. De fait, des changements structurels apparaissent nécessaires afin de réduire ces inégalités de genre, en permettant notamment une plus grande intégration de la question de genre aux processus décisionnels et politiques. C’est d’ailleurs l’un des objectifs des politiques étrangères féministes.

Le concept de politique étrangère féministe est défini comme suit par le Centre International de Recherche sur les Femmes (ICRW) : « La politique étrangère féministe est la politique d’un État qui définit ses interactions avec les autres États et mouvements d’une manière qui donne la priorité à l’égalité des sexes et consacre les droits humains de la femme et d’autres groupes traditionnellement marginalisés, alloue des ressources importantes à la réalisation de cette vision et cherche, par sa mise en œuvre, à perturber les structures de pouvoir patriarcales et masculines à travers tous ses leviers d’influence (aide, commerce, défense et diplomatie), éclairée par les voix d’activistes et de mouvements féministes^[1] Thompson L., Clement R., Définir une politique étrangère féministe (n.d.), ICRW www.icrw.org/wp-content/uploads/2019/06/Defining-Feminist-Foreign-Policy-Brief-French.pdf ». Ainsi, les politiques étrangères féministes auraient-elles un pouvoir transformatif tel qu’il mènerait à un changement de paradigme au profit de l’égalité de genre ? 

Des politiques étrangères féministes divergentes

Selon le Groupe des Nations unies pour le développement durable (GNUDD), « L’égalité des sexes et la participation des femmes constituent des éléments catalyseurs de la résilience sociale, économique et environnementale ainsi que des stratégies de réduction des risques et de durabilité, et de consolidation durable de la paix^[2]Manuel de référence pour l’intégration du genre dans la programmation conjointe de l’ONU au niveau de pays (Janvier 2018), Groupe des Nations Unies pour le développement. … Continue reading ». Si l’égalité de genre est essentielle à une société stable, elle est encore loin d’être atteinte : il est estimé que le travail domestique et le care empêchent environ 42% des femmes d’avoir un travail rémunéré, deux tiers des personnes analphabètes sont des femmes, et un tiers des femmes ont déjà subi des violences physiques ou sexuelles au cours de leur vie^[3]Oxfam France (2021, June 14). Les inégalités femmes-hommes dans le monde : chiffres clés. (n.d.) Oxfam France. … Continue reading. Au-delà de cette liste non-exhaustive, les inégalités de genre au détriment des femmes sont présentes dans tous les domaines, dans la sphère privée comme publique : rémunération, taux d’emploi, taux de scolarisation et de pauvreté, présence dans les institutions internationales ou les gouvernements.  

Il reste donc tout à faire en la matière, et, dans une société mondialisée, dans laquelle les pays sont plus que jamais interconnectés, le concept de politique étrangère féministe paraît être l’une des solutions les plus prometteuses. Toutefois, ce concept n’a pas de définition universelle, ce qui, parce que  la vision des États diffère, pourrait empêcher d’atteindre l’objectif commun de gender mainstreaming. C’est d’ores et déjà le cas avec les rares politiques étrangères mises en place, comme celles de la France, du Canada ou de l’Espagne.

D’autre part, ces politiques suivent des principes différents. Du côté de l’Espagne, la politique étrangère féministe est axée autour d’une approche transformatrice, d’un leadership engagé, d’une appropriation, d’une participation inclusive et développement de partenariats nationaux et internationaux, d’une diversité et intersectionnalité^[4]Politique étrangère féministe. (n.d.). Www.exteriores.gob.es. https://www.exteriores.gob.es/fr/PoliticaExterior/Paginas/PoliticaExteriorFeminista.aspx  . La politique étrangère féministe mexicaine est plutôt basée sur l’égalité des sexes et un ordre du jour féministe extérieur, un Ministère des Relations extérieures exempt de violence pour toutes et tous et une égalité visible et un Ministère des Relations extérieures féministe multidisciplinaire^[5]La politique extérieure féministe mexicaine au nombre des trois meilleures au monde. (n.d.). Embamex.sre.gob.mx. … Continue reading. La politique étrangère féministe canadienne, quant à elle, se focalise sur l’égalité de genre et l’empouvoirement des femmes et des filles, la dignité humaine, une croissance qui profite à tous, une action climatique et environnementale, une gouvernance inclusive et la paix et sécurité^[6]Canada’s Feminist International Assistance Policy. (2017, February 21). GAC. … Continue reading. Si certaines différences sont inévitables, au vu d’un contexte politique et géopolitique propre à chaque pays, un manque de cohésion et de définition pourrait être un frein à l’expansion des valeurs féministes que cette politique étrangère est supposée porter. Attribuer à la politique étrangère féministe une définition plus claire serait idéal afin d’atteindre les objectifs de développement durable de façon plus efficiente^[7]Stella Reminy-Elizor, Julia Ricci, Héloïse Versavel, La politique étrangère féministe pour atteindre les objectifs de développement durable,  (2023), Institut du Genre en Géopolitique, … Continue reading. 

Au-delà des questions de définition, d’autres aspects des politiques étrangères féministes mises en place sont critiquables : elles restent parfois principalement tournées vers la diplomatie pure, et demeurent trop peu transversales (en France notamment), le budget qui leur est dédié est trop faible et ne permet donc pas d’atteindre les objectifs fixés (en France également), une représentation trop faible des femmes au sein des institutions dédiées aux relations internationales des États concernés et une aide au développement finançant trop peu de projets pour l’égalité de genre^[8]Bilan à mi-parcours de la diplomatie féministe française : rapport 2020 du Haut Conseil à l’Égalité. (n.d.) France Diplomatie – Ministère de l’Europe et Des Affaires Étrangères., … Continue reading. 

Finalement, le risque de « genderwashing » est bien présent, dans le cas où les gouvernements affirment œuvrer pour l’égalité de genre et mènent des actions bien en-deçà ou contraire à ce qu’ils annoncent^[9]El-Alam D. et Berrutti P., (2022, November 3). The rise of gender washing. Altiorem. https://altiorem1.medium.com/the-rise-of-gender-washing-b257d96f66f  , au détriment de leurs ambitions féministes, comme c’est le cas de la France, troisième exportateur mondial d’armes en 2019^[10]Vie-Publique.fr.  (2023). https://www.vie-publique.fr/en-bref/286490-exportations-darmement-la-france-au-3e-rang-mondial-en-2021#:~:text=Le%20march%C3%A9%20mondial%20de%20l .

L’apparition de politiques étrangères féministes dans certains États a déjà porté ses fruits, ou, du moins, donné des exemples à suivre. La Suède et le Canada ont compris l’importance de la transversalité du féminisme en politique, et l’ont donc appliqué à l’intégralité des domaines composant la politique étrangère, des relations commerciales à la défense et la sécurité^[11]Bilan à mi-parcours de la diplomatie féministe française : rapport 2020 du Haut Conseil à l’Égalité. (n.d.) France Diplomatie – Ministère de l’Europe et Des Affaires Étrangères., … Continue reading. Le bilan de la politique étrangère féministe suédoise démontre que cette dernière a permis de mener des actions positives, la Suède ayant accompagné de nombreux pays vers davantage d’égalité de genre, notamment via l’abandon des mutilations génitales féminines par plus de quatre-vingt-dix communautés^[12]La Suède et le Canada arborent le drapeau de la politique étrangère féministe. (n.d.). Apolitical. … Continue reading. 

Il est essentiel que les pays conduisant une politique étrangère féministe mènent un leadership fort au sein des instances multilatérales, comme l’a fait le Canada en appuyant la création d’un conseil pour l’égalité femmes-hommes au G7 en 2018 ou la France, qui a fait de l’égalité femmes-hommes la ligne directrice du G7 de Biarritz en 2019.

De même, la société civile est un maillon indispensable de la politique étrangère féministe. Elle devrait par conséquent toujours être soutenue comme le fait la France, via le financement d’associations féministes à travers le Fonds de soutien aux organisations féministes (FSOF)^[13]La France engagée auprès des organisations féministes colombiennes. (n.d.). Www.afd.fr. … Continue reading. Annoncé en 2019 puis lancé en 2020, le FSOF soutient la société civile féministe dans les pays partenaires de la politique étrangère féministe de la France sur des thématiques telles que la santé reproductive, l’autonomisation ou l’accès à l’éducation des filles et des femmes.  

La diplomatie féministe face au backlash

De même, en cette période de backlash majeur, la mise en place d’une politique étrangère féministe devra s’inscrire dans une perspective de possible retour en arrière. En effet, les décisions politiques qui seront prises en faveur de l’égalité de genre pourraient être annulées par la suite, dans les prochains mois ou années. La notion de backlash, d’abord utilisée par Susan Faludi en son sens de « revanche », en référence aux conservateurs américains des années 1980 et 1990, mais qui peut aussi être traduit comme « retour de bâton » fait aujourd’hui allusion aux nombreux retours en arrière en termes de droits des femmes^[14]Clavaud, A., Daniel, L., Dereudre, C., & Zeller, L.-L. (2023). Droit des femmes : combattre le “backlash”. Recommandations pour la politique étrangère de la France. EQUIPOP et Fondation … Continue reading. La révocation du droit à l’avortement aux États-Unis en 2022 en est un exemple particulièrement parlant, tout comme l’interdiction faite aux Afghanes d’étudier et de travailler, ou la volonté du Président sud-coréen Yoon Seok-youl de supprimer le Ministère de l’Egalité de Genre et de la Famille. C’est également le cas de la Suède qui, pionnière dans le domaine de la politique étrangère féministe en 2014 grâce à sa Ministre des Affaires Etrangères Margot Wallström, l’a finalement abandonné en octobre 2022, après que l’extrême-droite ait été élue au pouvoir^[15]La Suède abandonne sa “diplomatie féministe” dont elle était pionnière. (2022, October 18). Geo.fr. … Continue reading. Cette tendance au backlash est un réel fléau, menaçant à la fois l’égalité de genre à travers le monde, mais aussi l’efficacité et surtout la durabilité des politiques étrangères féministes. C’est pourtant ici que se joue tout le rôle des politiques étrangères féministes, qui pourraient garantir les droits des femmes et des personnes LGBTI+ sur le long terme. 

Les politiques étrangères féministes ont toute leur importance dans ce contexte, en mettant ces sujets sur la scène internationale au travers de leurs relations bilatérales et multilatérales avec d’autres États, et en soutenant la société civile mobilisée pour l’égalité des genres. 

L’essentielle transversalité des politiques étrangères féministes et leur pouvoir transformatif

Si les politiques étrangères féministes touchent toujours à la sphère diplomatique au sens stricto sensu, il est nécessaire qu’elles soient transversales, et mènent à des changements structurels dans tous les domaines de la diplomatie : au sein des gouvernements et des institutions internationales, au niveau commercial et économique, au niveau de la sécurité, des conflits et de la paix, et sur les sujets de la migration, du changement climatique et du numérique notamment.  Sans transversalité, l’impact ne serait que bien plus mesuré.

Les États qui souhaitent mener une politique étrangère féministe ont notamment le pouvoir de faire changer les choses via leurs relations multilatérales, à l’occasion de rencontres internationales tels que les G7 et G20 et les COP, ou lors de rassemblements au sein des institutions internationales telles que les Nations unies ou l’Union européenne. Les gouvernements qui mènent des politiques étrangères féministes peuvent ainsi conduire un véritable travail de plaidoyer multilatéral en mettant en avant les sujets d’égalité de genre au cœur des rencontres internationales, comme cela a été le cas du Canada et de la France lorsqu’ils présidaient respectivement les G7 de 2018 et 2019.

De la même façon, la politique étrangère féministe a incité une féminisation du gouvernement et de la diplomatie mexicains de façon générale. Au Mexique, en 2013, seulement 36,8% du Parlement était composé de femmes, qui occupaient alors 184 sièges sur les 500 sièges au total. Ce chiffre augmente progressivement dans les années suivantes, atteignant 42,6% en 2018^[16]Classement mondial. (n.d.). Archive.ipu.org. Retrieved April 21, 2023, from http://archive.ipu.org/wmn-f/arc/classif010218.htm . Après l’adoption d’une politique étrangère féministe par le Mexique en 2019, le chiffre atteint 48,2% la même année. Finalement, il atteint la parité parfaite en 2022 et s’y maintient désormais. Toutefois, le gouvernement du pays reste insuffisamment féminisé, avec seulement 7 ministres femmes sur un total de 19 ministres^[17]Composition du gouvernement. (n.d.) France Diplomatie – Ministère de l’Europe et Des Affaires Étrangères. … Continue reading. 

Dans une société mondialisée, dans laquelle le commerce et l’économie occupent une place prégnante, la politique étrangère féministe a tout à jouer dans ces deux secteurs. La mondialisation a un effet différencié et inégal sur la population globale, notamment en fonction du genre, mais également de la religion, de l’ethnie, de l’orientation sexuelle, de la race, de l’âge, ou encore de la classe sociale. Les femmes, premières victimes de cette inégale répartition des richesses issues de la croissance économique mondiale, sont les plus confrontées à la précarité dans le monde du travail, travaillant davantage dans le secteur informel, pour des métiers moins rémunérés, à temps partiel, ou étant plus souvent sans-emploi. 

La politique étrangère féministe doit donc viser à réduire ces inégalités à la racine, à inclure davantage les femmes au marché du travail et à leur permette de bénéficier, autant que les hommes, des avantages de la mondialisation et de la croissance économique. 

Cette action doit également passer par une analyse plus poussée des investissements à l’étranger, afin de limiter les investissements et décisions qui pourraient avoir des conséquences négatives sur les femmes^[18]Courage et ambition, recommandations pour la politique étrangère du Canada. (Janvier 2021). Groupe de travail féministe sur la politique étrangère. … Continue reading. Les secteurs économiques dans lesquels les femmes sont surreprésentées ont un accès plus limité aux marchés étrangers, par exemple à cause de frais de douane plus élevés en Inde pour les produits agricoles, alors même que le secteur de l’agriculture emploie principalement des femmes^[19]Les femmes et le commerce, le rôle du commerce dans la promotion de l’égalité hommes-femmes, (2020). Groupe de la Banque mondiale et Organisation Mondiale du Commerce. … Continue reading. Il est ainsi estimé que, partout dans le monde, les frais de douane sont plus élevés pour les travailleuses que pour les travailleurs, car ils sont généralement plus élevés pour les secteurs qui emploient davantage de travailleurs à bas salaire^[20]Les femmes et le commerce, le rôle du commerce dans la promotion de l’égalité hommes-femmes, (2020). Groupe de la Banque mondiale et Organisation Mondiale du Commerce. … Continue reading. Cette question relève de la politique commerciale de chaque gouvernement, et pourrait être prise en compte dans la mise en place de politiques étrangères féministes.

Il est notamment possible et souhaitable que les gouvernements menant une politique étrangère féministe soutiennent l’émancipation économique des femmes, comme le fait la France à travers l’intiative AFAWA (Affirmative Finance Action for Women in Africa) pour favoriser l’accès des femmes au financement en Afrique^[21]Initiative pour favoriser l’accès des femmes au financement en Afrique (AFAWA). (16 avril 2019). Banque Africaine de Développement – Bâtir Aujourd’hui, Une Meilleure Afrique Demain. … Continue reading.

De plus, dans le contexte de leurs relations bilatérales, les États ont la possibilité de diffuser l’égalité de genre via des clauses spéciales et spécifiques dans les accords commerciaux. 

Au-delà du secteur des affaires, les politiques étrangère féministes ont un rôle important à jouer en matière de paix et de sécurité. En effet, la résolution 1325 de l’ONU l’a affirmé dès les années 2000 : les questions d’inégalités de genre et de paix et sécurité sont intimement liées. Il est considéré, principalement au sein de la société civile, que la mise en place d’une politique étrangère féministe passe par une démilitarisation et la promotion de la non-violence car le féminisme tend à remettre en question les motifs de domination, d’oppression et d’expression de la violence^[22]Courage et ambition, recommandations pour la politique étrangère du Canada. (Janvier 2021). Groupe de travail féministe sur la politique étrangère. … Continue reading. Ainsi, la féminisation du secteur militaire ne suffirait pas à agir de façon structurelle sur les inégalités de genre, notamment sur l’impact que peuvent avoir les conflits sur les femmes. En outre, après les conflits, les violences à l’encontre des femmes tendent à augmenter^[23]Les droits humains des femmes et les problématiques liées au genre dans les situations de conflit et d’instabilité. (n.d.). OHCHR.  … Continue reading.

Si les pays ayant mis en place une politique étrangère féministe agissent pour promouvoir davantage la parité au sein de leurs armées, comme la France avec son plan mixité de mars 2019 pour le ministère des Armées^[24]La diplomatie féministe, D’un slogan mobilisateur à une véritable dynamique de changement ? (22 septembre 2020). Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les … Continue reading, l’enjeu est en réalité plus complexe. Il faudrait donc aller plus loin sur les sujets de démilitarisation ou de ventes d’armes notamment.

La migration, un sujet oublié des politiques étrangères féministes

Souvent focalisées sur les questions diplomatiques pures, les politiques étrangères féministes ont tendance à oublier certains enjeux actuels majeurs tels que les migrations. Dans un monde où les conflits se multiplient, et où il est estimé que d’ici 2030 le changement climatique devrait provoquer la migration de 260 millions de personnes, et de 2,5 milliards de personnes d’ici 2050^[25]Jarry, C. (2022, September 15). Réfugié climatique : fuir les conséquences du changement climatique. Oxfam France. … Continue reading, les politiques étrangères féministes doivent prendre en compte cette dimension. 

Les questions de genre et de migrations sont intimement liées, le genre ayant à la fois une influence sur les causes et les conséquences de la migration pour les femmes, qui représentent environ la moitié des migrant·es et réfugié·es dans le monde^[26]Mais où est le genre ? Les impacts du genre sur la migration internationale. (2019, November 20). Youmanity. … Continue reading. Ainsi, les motifs de la migration peuvent différer, allant de la pauvreté, largement féminisée, aux violences faites aux femmes induites par les conflits comme les violences sexuelles^[27]Mais où est le genre ? Les impacts du genre sur la migration internationale. (2019, November 20). Youmanity. … Continue reading, en passant par le changement climatique, qui impacte bien plus fortement les femmes que les hommes, à la situation précaire des femmes sur le marché du travail, étant davantage confrontées au travail informel notamment.

De fait, il est souhaitable que les politiques étrangères féministes intègrent la dimension de genre aux politiques migratoires. Elles pourraient ainsi tenir compte du fait que le genre soit un motif de persécution, d’autant plus pour les femmes qui présentent d’autres facteurs de discrimination, comme la race, l’orientation sexuelle, l’ethnie, la religion ou la classe sociale et ainsi opérer un réel changement structurel, permettant notamment de faire évoluer les critères de regroupement familial qui avantagent actuellement les hommes^[28]Mais où est le genre ? Les impacts du genre sur la migration internationale. (2019, November 20). Youmanity. … Continue reading, et œuvrant sur les causes et conséquences de ces migrations, pour que les femmes ne soient plus victimes de trafic d’êtres humains ou de précarité.

L’impact genré du changement climatique

Des facteurs économiques, sociaux et culturels font que les femmes sont plus durement impactées par les changements climatiques que les hommes^[29]Les femmes …dans le contexte des changements climatiques | Nations Unies. (n.d.) United Nations. https://www.un.org/fr/chronicle/article/le-femmes-dans-le-contexte-des-changements-climatiques , notamment parce qu’elles ont un accès moindre aux ressources et que leur situation est plus précaire. La prise en compte des questions de genre dans la lutte contre le changement climatique est essentielle, surtout dans le cadre des politiques étrangères féministes. L’Allemagne, qui a présenté sa politique étrangère féministe en mars 2023, s’assure que les projets de lutte contre le changement climatique qu’elle finance sont inclusifs, et que des femmes ou des personnes issues de minorités y participent^[30]Politique étrangère allemande féministe : qu’est-ce que cela signifie ? // Le réchauffement climatique menace la pêche sur glace au Canada (le 8 mars 2023). Dw.com. … Continue reading. Les gouvernements menant une politique étrangère féministe peuvent induire un véritable changement structurel en incluant davantage de femmes, de personnes LGBTQI+ ou de personnes marginalisées par exemple, aux instances décisionnelles sur le sujet du changement climatique. La société civile, largement féminisée, est un autre acteur majeur de cette lutte^[31]La société civile est un élément clé de la résilience au changement climatique, déclare M. Adesina. (7 Octobre 2022). Banque Africaine de Développement. … Continue reading.

Des décisions politiques sensibles au genre pourraient permettre d’améliorer leur impact, en prenant en compte les besoins de l’ensemble de la population, et les particularités auxquelles sont soumises les femmes en matière de changement climatique. 

La politique étrangère féministe : un outil puissant

Les inégalités de genre sont complexes et profondément ancrées dans notre société. Le multilatéralisme fait de la politique étrangère féministe une réponse nécessaire et adaptée aux inégalités de genre. Si ce nouveau type de politique prend en compte le genre de façon transversale et intersectionnelle, alors elle a le pouvoir d’amener à des changements structurels, voire à un changement de paradigme au profit de l’égalité de genre. 

Il ne s’agirait pas là « d’ajouter des femmes et remuer », mais bel et bien de s’appuyer sur la transversalité afin de prendre en compte le genre dans tous les secteurs politiques, allant de la paix et sécurité au changement climatique, en passant par la migration. C’est à travers cette transversalité que la politique étrangère féministe pourra exprimer son plein potentiel.

Pour citer cette production: IMPAGLIAZZO Cassandre, “La politique étrangère féministe : vers un changement structurel au profit de l’égalité de genre ? ”, (24/04/23), Institut du Genre en Géopolitique. https://igg-geo.org/?p=12283

Les propos contenus dans cet écrit n’engagent que l’autrice.