Géorgie : les droits LGBTQIA+ à l’épreuve d’un tournant anti-occidental

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Estelle Houtart

13/04/25

Le 17 septembre 2024, le parlement géorgien adoptait un ensemble législatif sur les « valeurs familiales et la protection des mineurs ». Cet ensemble législatif vise explicitement les droits des minorités sexuelles et de genre en imposant des mesures portant gravement atteinte à leurs droits[1]Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. … Continue reading. Il impose notamment une interdiction de la « propagande homosexuelle », une censure des films, livres et sources d’information sur les personnes LGBTQIA+[2]Désigne les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans, queer, intersexes, asexuelles ou toute personne ne se reconnaissant pas dans les normes hétérosexuelles et cisgenres., la non-reconnaissance des couples de même sexe, une interdiction des chirurgies de réassignation sexuelle, une obligation de marquer son « sexe biologique » dans les documents administratifs et contrats de travail, etc.[3]ILGA-Europe. (2024, September 18). Statement: The President of Georgia must not sign “On Family Values and the Protection of Minors” legislative package into law. … Continue reading

Cette politique anti-LGBTQIA+ a été menée par le groupe politique « Rêve géorgien » au pouvoir depuis 2012, fondé par le milliardaire Bidzina Ivanichvili et qui poursuivait à son origine un programme libéral et pro-occidental[4]Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. … Continue reading. Le parti a depuis fait volte-face et ses politiques liberticides ainsi que sa récente décision de suspendre le processus d’intégration européenne de la Géorgie jusqu’en 2028 sont à l’origine des manifestations massives et des troubles politiques accrus que connaît la Géorgie actuellement. Les élections du 26 octobre dernier remportées par ce même parti sont également contestées ainsi que l’élection de l’ancien joueur de football Mikhaïl Kavelachvili comme nouveau président. Alors qu’elle était encore présidente, Salomé Zourabichvili, pro-européenne, avait refusé de signer l’ensemble législatif sur les valeurs familiales et la protection des mineurs (ci-après lois « valeurs familiales ») toutefois promulguée[5]Le Monde avec AFP. (2024, October 3). En Géorgie, la loi restreignant les droits LGBTQIA + promulguée par le président du Parlement. Le Monde.fr. … Continue reading. Les tensions accrues entre le gouvernement et Salomé Zourabichvili s’étaient déjà intensifiées au printemps 2024 lorsque la présidente avait refusé de signer la loi sur la transparence de l’influence étrangère (ci-après loi « influence étrangère »). L’adoption de cette loi qui oblige les organisations associatives et les médias recevant plus de 20 % de leurs fonds de l’étranger à se déclarer comme des organisations « portant les intérêts d’une puissance étrangère »[6]ILGA-Europe. (2024, September 18). Statement: The President of Georgia must not sign “On Family Values and the Protection of Minors” legislative package into law. … Continue reading avait déjà déclenché une première vague de manifestations dans la capitale géorgienne[7]Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. … Continue reading.

Sous le feu des projecteurs internationaux, la Géorgie est donc à un tournant géopolitique important. Le pays était pourtant connu comme un modèle démocratique dans sa zone géographique[8]Ibid. et avait montré une tendance pro-européenne qui l’avait menée à obtenir le statut de pays candidat à l’Union européenne (UE) en 2023[9]Delcour, L. (2024). Un changement de paradigme ? L’Union européenne et l’Eurasie depuis la guerre en Ukraine, in de Tinguy, A. (dir.), Regards sur l’Eurasie. L’année politique 2023. Les … Continue reading. Mais le parti Rêve géorgien est aujourd’hui accusé de se rapprocher de la Russie en revenant sur ses promesses d’intégration à l’Union européenne. La tendance anti-LGBTQIA+ du gouvernement géorgien serait-elle un symptôme de sa tendance plus largement anti-occidentale ? Au sein de ces jeux politiques, les droits LGBTQIA+ polarisent en effet particulièrement et semblent prendre le rôle d’un cheval de bataille entre l’Union européenne et les nationalistes géorgiens.

Les vas-et-viens entre le gouvernement géorgien et l’Union européenne

Après la chute de l’Union soviétique en 1991, la Géorgie a vécu quelques années de troubles marquées par la guerre civile. Au même moment, le peuple géorgien se tournait de plus en plus vers l’Ouest et la révolution des Roses en 2003 entérina la Géorgie comme un modèle démocratique dans l’ex-Union soviétique[10]Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. … Continue reading. Le pays renforça déjà considérablement ses liens avec l’UE en signant un accord d’association en 2014 incluant une zone de libre-échange et en négociant une libéralisation du régime des visas[11]Ibid.. Ce sont sur ces bases et après l’invasion russe en Ukraine que la Géorgie déposa à nouveau sa candidature d’adhésion à l’UE aux côtés de la Moldavie et peu après l’Ukraine[12]Delcour, L. (2024). Un changement de paradigme ? L’Union européenne et l’Eurasie depuis la guerre en Ukraine. In de Tinguy, A. (dir.), Regards sur l’Eurasie. L’année politique 2023. Les … Continue reading. En décembre 2023, le Conseil européen accorda officiellement le statut de pays candidat à la Géorgie[13]Ibid.

Néanmoins, le 28 novembre 2024, soit un peu moins d’un an plus tard, le Premier ministre géorgien, Irakli Kobakhidze, annonçait qu’il reportait les négociations d’adhésion à l’Union européenne à 2028 marquant un réel retournement de situation[14]La rédaction (2024, November 29). Géorgie : le gouvernement reporte sa demande d’adhésion à l’Union européenne. Le club des juristes. … Continue reading. Les tendances anti-occidentales de la Géorgie ont débuté avec la fameuse loi « influence étrangère » dont le contenu est fortement inspiré d’une loi russe similaire devenue un modèle déjà copié par plusieurs gouvernements aux tendances autoritaires comme la Hongrie, l’Azerbaïdjan, le Kirghizistan et le Kazakhstan[15]Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. … Continue reading. Nous le rappelons, cette loi impose aux organisations associatives et aux médias dont plus de 20 % des fonds proviennent de l’étranger de s’enregistrer en tant qu’organisations portant les intérêts d’une puissance étrangère[16]ILGA-Europe. (2024, September 18). Statement: The President of Georgia must not sign “On Family Values and the Protection of Minors” legislative package into law. … Continue reading. Or, les organisations de défense des droits humains, notamment celles œuvrant pour les droits LGBTQIA+, sont largement financées par des donateur·rice·s occidentaux·ales, comme l’UE. Elles sont donc parmi les premières cibles du gouvernement[17]Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. … Continue reading

Anti-démocratique, et symboliquement profondément anti-occidentale, la loi « influence étrangère » peut certainement être considérée comme « le début de la fin » des promesses d’intégration à l’UE pourtant initialement portées par le parti Rêve géorgien en 2012[18]Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. … Continue reading. Elle est par ailleurs à l’origine des manifestations massives de l’été 2024 dans les rues de la capitale géorgienne. Après la loi « influence étrangère » et les lois « valeurs familiales », ce sont les élections du 26 octobre dernier qui ont largement été contestées. Le média Civil Georgia décrit ces élections comme un « vol » du parti Rêve géorgien, rentrant dans « un assaut plus large de l’ordre constitutionnel de la Géorgie » [traduction libre] [19]Gutbrod, H. (2024, December 7). Defending the Future: Understanding Georgia’s Fall Protests. Civil Georgia. https://civil.ge/archives/642540. Le média rapporte notamment, à l’instar d’observateurs internationaux[20]Organization for Security and Co-operation in Europe. (2024, October 25). Georgia, Parliamentary Elections, 26 October 2024: Statement of Preliminary Findings and Conclusions. … Continue reading, des allégations d’achat de vote, de violations du secret de vote ou encore de campagnes d’intimidation[21]Gutbrod, H. (2024, December 7). Defending the Future: Understanding Georgia’s Fall Protests. Civil Georgia. https://civil.ge/archives/642540. Les manifestations massives que connaît encore actuellement la Géorgie portent fréquemment un symbole ayant toute son importance : le drapeau de l’UE.

Les droits humains dans les négociations d’adhésion à l’Union européenne

De son côté, l’Union européenne n’a pas tardé non plus à marquer son mécontentement par rapport à la virée autoritaire et anti-occidentale de la Géorgie. Déjà en juin, le Conseil européen avait décidé de geler la candidature géorgienne[22]Conseil européen. Géorgie. https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/eu-georgia-relations/ à la suite de l’adoption de la loi « influence étrangère ». Il a réitéré sa position en octobre après l’adoption des lois « valeurs familiales » s’alignant avec la Commission européenne. 

Ces rappels à l’ordre illustrent l’importance accordée par l’Union européenne au respect des droits humains dans les négociations d’adhésion. Les critères d’adhésion, dits “critères de Copenhague” formulés par le Conseil européen lors du sommet de Copenhague, sont généralement classés en trois catégories[23]European Neighbourhood Policy and Enlargement Negotiations (DG NEAR). Conditions for membership. https://neighbourhood-enlargement.ec.europa.eu/enlargement-policy/conditions-membership_en : politiques[24]Les critères politiques renvoient à la stabilité des institutions politiques à assurer la démocratie, l’Etat de droit, les droits humains et la protection des minorités., économiques[25]Les critères économiques renvoient à la capacité à faire face à la concurrence du marché intérieur de l’Union. et ceux concernant l’acquis communautaire [26]Les critères concernant l’acquis communautaire renvoient à la transposition, dans la législation nationale, de l’ensemble du droit européen en vigueur.. Les critères politiques se retrouvent aussi aux articles 49 et 2 du traité sur l’Union européenne, conditionnant l’adhésion d’un Etat au respect et à la promotion des valeurs fondamentales de l’Union. Les critères de Copenhague, énoncés pour la première fois en 1993, font partie intégrante des négociations d’adhésion. Ils n’en restent pas moins des critères assez abstraits et leur contenu exact ne se précise qu’au fil des rapports et autres documents politiques produits par l’UE depuis[27]T. Marktler. (2006, December). The Power of the Copenhagen Criteria. Croatian Yearbook of European Law and Policy, 2(2), 343-363. https://hrcak.srce.hr/file/44723.

Plus concrètement, le statut de candidat n’a été accordé à la Géorgie qu’à condition de progresser sur les neuf « priorités » émises par la Commission dans son rapport sur la Géorgie 2023[28]Conseil européen. Géorgie. https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/eu-georgia-relations/. Ces priorités comprenaient, notamment, la lutte contre la corruption, un système électoral plus équitable, une réforme du système judiciaire, la protection de l’indépendance des médias, une « dé-oligarchisation » des sphères économique et politique ou encore une meilleure protection des droits fondamentaux des groupes vulnérables. La commission demande par exemple d’améliorer les poursuites judiciaires contre les auteur·rice·s et les instigateur·rice·s d’actes de violence à l’encontre de ces groupes[29]European Neighbourhood Policy and Enlargement Negotiations (DG NEAR). (2023, Novembre 8). Georgia Report 2023, https://neighbourhood-enlargement.ec.europa.eu/georgia-report-2023_en ; A titre de … Continue reading. Il est intéressant pour la suite de cet article de souligner que la Commission mentionne explicitement les violences perpétuées en juillet 2021 et juillet 2023 lors des marches des fiertés (ou « prides ») de Tbilisi et demande à la Géorgie de fournir des efforts pour assurer la liberté d’association et d’expression lors de ces événements. Elle précise aussi que le nouveau plan d’action sur les droits humains adopté par la Géorgie doit, aussi, assurer le respect des droits des personnes LGBTQIA+[30]Ibid.

Loin de suivre ces recommandations, la Géorgie s’en est plutôt éloignée, ce qui explique que l’UE ait rapidement pris la mesure de geler les négociations d’adhésion. Dans son rapport de 2024 sorti en octobre dernier, la Commission critique vivement l’adoption de la loi « influence étrangère » décrite comme portant atteinte à la liberté d’association et d’expression, au droit à la vie privée, au droit de participer aux affaires publiques et à l’interdiction de discrimination[31]European Neighbourhood Policy and Enlargement Negotiations (DG NEAR). (2024, October 30). Georgia Report 2024, p. 26. https://neighbourhood-enlargement.ec.europa.eu/georgia-report-2024_en. Elle mentionne aussi explicitement l’adoption des lois « valeurs familiales » en critiquant leur impact sur l’augmentation des discours de haine et sur l’environnement « de plus en plus hostile et stigmatisant à l’égard des personnes LGBTIQ », le manque de consultations publiques préalables et l’absence d’analyse de conformité aux standards européens et internationaux[32]Ibid., p. 25.

Pour appuyer cette idée de standards européens et internationaux, la Commission s’aligne souvent sur d’autres organisations internationales comme le Conseil de l’Europe et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (ci-après « l’OSCE ») dont la Géorgie est membre depuis 1999 et 1992. Dans son rapport 2024 sur la Géorgie, la Commission fait, en effet, une quinzaine de références à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, et une quarantaine de références à la Commission dite « de Venise » qui est un organe consultatif du Conseil de l’Europe. Cette dernière a publié deux avis à un mois d’intervalle concernant la Géorgie : l’un sur la loi « influence étrangère »[33]Venice Commission. (2024, June 21-22).  Georgia – Urgent Opinion on the Law of Georgia on Transparency of Foreign Influence, issued on 21 May 2024, pursuant to Article 14a of the Venice … Continue reading et l’autre sur les lois « valeurs familiales »[34]Venice Commission. (2024, June 21-22). Géorgie – Avis sur le projet de loi constitutionnelle sur la protection des valeurs familiales et des mineurs, adopté par la Commission de Venise lors … Continue reading, recommandant dans les deux cas de les abandonner. Pour ce qui est de l’OSCE, ce sont les conclusions préliminaires de sa mission d’observation lors des élections parlementaires de 2024 qui sont régulièrement citées. Elles soulignent notamment des atteintes au secret du vote, des incohérences dans les procédures, ainsi que des intimidations et pressions exercées sur les électeur·rice·s[35]Organization for Security and Co-operation in Europe. (2024, October 25). Georgia, Parliamentary Elections, 26 October 2024: Statement of Preliminary Findings and Conclusions. … Continue reading

Bien que les standards européens soient définis par de multiples organisations, cet article cherche à mettre en lumière l’utilisation qu’en fait l’UE dans ces relations géopolitiques pour favoriser l’« européanisation » de ses pays voisins. Selon la chercheuse ukrainienne Maryna Shevtsova, l’Union utilise trois mécanismes d’européanisation : la conditionnalité, la persuasion, et le développement de capacités[36]Shevtsova, M. (2020). Fighting “Gayropa”: Europeanization and Instrumentalization of LGBTI Rights in Ukrainian Public Debate. Problems of Post-Communism, 67(6), 500–510. … Continue reading. D’après Shevtsova, la conditionnalité est le mécanisme privilégié notamment dans le cadre de négociations d’adhésion puisqu’il inscrit les pays candidats dans une logique de sanction/récompense incitant ces derniers à répondre aux exigences imposées. La chercheuse explique que cet instrument est aussi utilisé dans le cadre d’accords commerciaux ou de libéralisation du régime des visas[37]Ibid.. La persuasion renvoie, quant à elle, au déploiement d’une image de « modèle global » progressiste influençant l’adoption des normes communautaires. Enfin, le renforcement des capacités concerne les politiques d’assistance financière, technique et politique offertes aux structures nationales afin de leur permettre de devenir elles-mêmes les moteurs des changements[38]Ibid..

Les droits LGBTQIA+ comme facteur d’altérité Est/Ouest

Parmi l’utilisation géopolitique des standards européens, les droits LGBTQIA+ prennent une place importante. Pour ne citer que deux exemples, en 2015, l’Ukraine a adopté sa première loi liée aux droits LGBTQIA+ à savoir l’interdiction de discrimination à l’emploi sur la base de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre[39]Ibid.. Selon le média euobserver cette modification aurait été adoptée « pour faire plaisir à Bruxelles »[40]Teffer. (2015, Novembre 13). Ukraine gives equal rights to gay workers, to please Brussels. euobserver. https://euobserver.com/lgbti/131098. En effet, plusieurs parlementaires ont publiquement expliqué qu’ils avaient soutenu la loi par nécessité plutôt que par conviction[41]Shevtsova, M. (2020). Fighting “Gayropa”: Europeanization and Instrumentalization of LGBTI Rights in Ukrainian Public Debate. Problems of Post-Communism, 67(6), 500–510. … Continue reading car il s’agissait d’une condition imposée par l’Union européenne dans le cadre des négociation de la libéralisation du régime des visas[42]Teffer. (2015, Novembre 13). Ukraine gives equal rights to gay workers, to please Brussels. euobserver. https://euobserver.com/lgbti/131098. L’Union européenne avait déjà utilisé l’argument des visas en 2012 pour dissuader le parlement ukrainien, qui, à l’instar de la Russie (et aujourd’hui de la Géorgie), envisageait une loi criminalisant la « propagande de l’homosexualité »[43]Shevtsova, M. (2020). Fighting “Gayropa”: Europeanization and Instrumentalization of LGBTI Rights in Ukrainian Public Debate. Problems of Post-Communism, 67(6), 500–510. … Continue reading. Un deuxième exemple étudié dans la littérature est le test décisif que représente aujourd’hui la capacité d’un Etat à assurer l’organisation d’une pride[44]Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. … Continue reading. L’Union européenne évalue entre autres chaque année le succès de la pride de Belgrade dans le cadre des négociations d’adhésion de la Serbie. Selon le chercheur Koen Slootmaeckers, l’évaluation se concentre sur l’événement en soi, sans nécessairement examiner s’il a réellement réussi à améliorer les expériences des personnes LGBTQIA+ locales[45]K. Slootmaeckers, (2017). The litmus test of pride: analysing the emergence of the Belgrade “Ghost” pride in the context of EU accession. East European Politics, 33(4), 517–535. … Continue reading

Shevtsova souligne que, si les politiques de conditionnalité ont certainement engendré des réformes dans les pays voulant se rapprocher de l’Union européenne, ces réformes découlent d’un processus bureaucratique « top-down » qui, bien souvent, n’a pas réussi à transformer les mentalités locales[46]Shevtsova, M. (2020). Fighting “Gayropa”: Europeanization and Instrumentalization of LGBTI Rights in Ukrainian Public Debate. Problems of Post-Communism, 67(6), 500–510. … Continue reading. Pour reprendre l’exemple de la pride de Belgrade, le caractère ultrasécuritaire de la marche, en réalité quasi-invisible du grand public tant la menace des contre-manifestant·e·s reste importante, lui a valu une appellation de pride « étatique » puis « fantôme ».  Les activistes locaux·ales ont fini par s’en dissocier ne se sentant pas réellement représenté·e·s par cet événement[47]K. Slootmaeckers, (2017). The litmus test of pride: analysing the emergence of the Belgrade “Ghost” pride in the context of EU accession. East European Politics, 33(4), 517–535. … Continue reading. En outre, à force d’associer les droits LGBTQIA+ aux valeurs et standards européens, l’Union aurait contribué à leur « européanisation »[48]Ibid.. Cette association se retrouve dangereusement mobilisée par les politiques et discours homophobes s’érigeant comme symboles de résistance à l’imposition des normes européennes. Ainsi, et parce que les changements en faveur des droits LGBTQIA+ répondent à un processus bureaucratique, les mentalités locales résistent à ces changements vu comme une norme imposée par une élite pro-occidentale[49]Ziemer, U., and Roberts, S. P. (2024). Populist political masculinities, gender equality, and norm contestation in Armenia and Georgia. International Feminist Journal of Politics, 26(4), 804. … Continue reading.  

Ce phénomène d’ « européanisation » des droits des minorités sexuelles et de genre a grandement été alimenté par la propagande anti-occidentale du Kremlin qui place la Russie comme gardienne des valeurs traditionnelles et d’un modèle familial sacré [50]Oleg, R. and Ryabova, T. (2014, February 5). The decline of Gayropa? How Russia intends to save the world. Eurozine. https://www.eurozine.com/the-decline-of-gayropa/. Le néologisme russe « Gayrope » caractérise ce discours plaçant les droits LGBTQIA+ comme marqueur fondamental d’altérité entre l’Est et l’Ouest, confondant le militantisme pro-européen et « pro-gay »[51]Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. … Continue reading. Cette double dichotomie Est/Ouest et anti-/pro-LGBT renforce l’idée d’une opposition irréductible entre deux systèmes de valeurs. Pour les pays en procédure d’adhésion, mais aussi tout le voisinage oriental de l’Union européenne, l’homophobie[52]Ici utilisé comme terme générique pour désigner la haine à l’égard des personnes LGBTQIA+. politique, par ailleurs mêlée à des discours masculinistes favorisés par la militarisation grandissante de la région[53]Ziemer, U., and Roberts, S. P. (2024). Populist political masculinities, gender equality, and norm contestation in Armenia and Georgia. International Feminist Journal of Politics, 26(4), 800-803. … Continue reading, devient alors un instrument nationaliste ou anti-occidental puissant[54]Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. … Continue reading.

Cette double dichotomie a également eu des conséquences sur les mouvements féministes. La chercheuse géorgienne Tamar Tskhadadze explique par exemple que la « norme occidentale » a une haute importance dans les débats politiques géorgiens en particulier pour les questions d’émancipation des femmes et des minorités sexuelles et de genre[55]Tskhadadze, T. (2017). “ »The West” and Georgian “Difference”: Discursive Politics ofGender and Sexuality in Georgia”. In Gender in Georgia. Feminist Perspectives on Culture, Nation, and … Continue reading. S’y ajoute une idée de destinée européenne qui aurait été volée pendant les années d’occupation soviétique ce qui expliquerait les « années de retard » de la Géorgie sur l’Occident[56]Ibid.. Tskhadadze ajoute néanmoins que l’association du féminisme/progressisme et de l’occident a tendance à invisibiliser les origines Marxistes et communistes de plusieurs mouvements féministes géorgiens et à oublier que les grands accords internationaux en matière de droit des femmes comme la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) et la Déclaration et le Programme d’action de Beijing ont été principalement portés par des pays du « bloc de l’Est »[57]Ibid..

Conséquences sur la politique géorgienne

Décriminalisant l’homosexualité en 2000, la Géorgie a graduellement continué à adopter des lois favorables à l’égard des LGBTQIA+ depuis. La place centrale de la « norme occidentale » dans les discours libéraux a sans doute contribué à ces changements[58]Tskhadadze, T. (2017). “ »The West” and Georgian “Difference”: Discursive Politics ofGender and Sexuality in Georgia”. In Gender in Georgia. Feminist Perspectives on Culture, Nation, and … Continue reading. Mais certains changements relèvent surtout de mécanismes de conditionnalité, à l’instar des exemples présentés précédemment.  L’UE a en effet usé de son levier diplomatique pour faire adopter la loi de 2014 interdisant toutes formes de discriminations dont celles basées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre dans le cadre des négociations autour de l’accord d’association et de la libéralisation du régime des visa[59]Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. … Continue reading. La forte réaction des conservateur·rice·s géorgien·ne·s face à cette réforme a même conduit l’Union a publié un document visant à déconstruire certains mythes comme celui de forcer la Géorgie à adopter le mariage homosexuel[60]Ibid. ; Füle, S. (European Commissioner for Enlargement and European Neighbourhood Policy) (2014, March 4). EU-Georgia: About myths and true benefits of Association Agreement. … Continue reading.  

Par ailleurs, bien qu’il soit difficile de déceler clairement les influences en jeu, il apparaît que les politiques anti-LGBTQIA+ géorgiennes sont fortement inspirées des politiques russes similaires. Malgré les tensions importantes entre la Géorgie et la Russie, les contacts entre les deux pays sont importants. Après l’invasion russe en Ukraine, le pouvoir géorgien a soutenu les condamnations internationales mais a refusé d’imposer des sanctions économiques à Moscou[61]Merlin, A. (2024). La Géorgie à l’heure de l’invasion de l’Ukraine : le dissensus entre pouvoir et société. In de Tinguy, A. (dir.), Regards sur l’Eurasie. L’année politique 2023. … Continue reading. La Géorgie a alors été soupçonnée de se placer dans une stratégie permettant à la Russie d’éviter les sanctions occidentales[62]Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. … Continue reading.  Les mouvements anti-LGBTQIA+ en Géorgie reprennent par ailleurs la rhétorique russe justifiant l’homophobie politique par une préservation des valeurs nationales et religieuses contre le système de valeurs occidental « décadent »[63]Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. … Continue reading. Cette homophobie politique est aussi liée à une construction identitaire nationaliste présentant les identités alternatives comme « ennemies » de la Géorgie[64]Ziemer, U., and Roberts, S. P. (2024). Populist political masculinities, gender equality, and norm contestation in Armenia and Georgia. International Feminist Journal of Politics, 26(4), 800-803. … Continue reading. Elle mène fréquemment à des actes de violence comme en 2013 lorsqu’une centaine d’activistes réuni·e·s pour la journée mondiale contre l’homophobie, la transphobie et la biphobie ont été attaqué·e·s par des contre-manifestant·e·s dirigé·e·s par un religieux orthodoxe[65]Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. … Continue reading ou en 2019 lorsque la première pride de Tbilissi a dû se disperser après 30 minutes à cause de menaces[66]Ibid..  Les prides suivantes ont également été scènes de nombreuses violences et la pride de 2024 été annulée pour des raisons de sécurité[67]ILGA-Europe. (2024, September 18). Statement: The President of Georgia must not sign “On Family Values and the Protection of Minors” legislative package into law. … Continue reading. Dans ce contexte, l’adoption précipitée des lois « valeurs familiales », quelques semaines avant les élections d’octobre, apparaît clairement comme une récupération électorale de ces discours nationalistes ambiants par le groupe politique Rêve géorgien. Irakli Kobakhidzé a d’ailleurs avancé l’argument nationaliste pour justifier le report des négociations d’adhésion, affirmant que les exigences de l’Union européenne étaient indignes et menaçaient les valeurs traditionnelles de la Géorgie[68]EURACTIV France avec AFP. (2024, Novembre 29). Géorgie : la police tire des gaz lacrymogènes contre des manifestants pro-UE. Euractiv. … Continue reading.  

Si la double dichotomie Est/Ouest et anti-/pro-LGBT est un vecteur d’homophobie en Géorgie, certain·e·s auteur·rice·s décrivent également comment les activistes LGBTQIA+ naviguent dans la politisation grandissante de leurs droits. Par exemple, selon la chercheuse Laura Luciani, le « test décisif » que représente aujourd’hui les prides aux yeux de l’Union européenne influence les stratégies militantes géorgiennes[69]Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. … Continue reading. Elle cite un organisateur de la première pride de Tbilisi qui soutient que la quête de visibilité internationale faisait partie de la stratégie pour faire pression sur le gouvernement géorgien[70]Ibid.. Cette approche aurait contraint le gouvernement à mobiliser la police pour protéger les manifestant·e·s, une mesure qu’il n’aurait autrement jamais prise[71]Ibid..  La politisation de leurs droits crée donc des nouvelles possibilités de mobilisation pour les activistes et permet par ailleurs de chercher des alliances auprès de partis politiques pro-occidentaux[72]Shevtsova, M. (2020). Fighting “Gayropa”: Europeanization and Instrumentalization of LGBTI Rights in Ukrainian Public Debate. Problems of Post-Communism, 67(6), 500–510. … Continue reading. Néanmoins, une autre stratégie rapportée par exemple par une organisation LGBTQIA+ ukrainienne consiste, à contre-cœur, à rester « invisibles » dans les luttes pro-européennes [73]Ibid..

Conclusion 

L’adoption des lois « valeurs familiales » s’inscrit donc dans les tendances progressivement anti-occidentales du parti au pouvoir Rêve géorgien. La loi « influence étrangère » portée par ce même gouvernement quelques mois avant avait déjà marqué la fin des promesses d’intégration à l’Union européenne pourtant initialement portées par le parti en 2012[74]Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. … Continue reading.  Cette loi a aussi déclenché une première vague de colère d’une large partie de la société civile, soutenue par la présidente alors au pouvoir, Salomé Zourabichvili. Depuis les élections contestées du 26 octobre, les manifestations en Géorgie se poursuivent dans un climat de plus en plus répressif. Le premier ministre Irakli Kobakhidzé nie toutes les allégations concernant les élections et renforce sa politique d’autorité en sanctionnant lourdement les actes contestataires [75]EURACTIV France avec AFP. (2024, Novembre 29). Géorgie : la police tire des gaz lacrymogènes contre des manifestants pro-UE. Euractiv. … Continue reading.

L’Union européenne est dans une position délicate. Des mesures fortes de sa part sont attendues par les manifestant·e·s qui l’ont érigée en symbole de liberté et d’un meilleur futur[76]Gutbrod, H. (2024, December 7). Defending the Future: Understanding Georgia’s Fall Protests. Civil Georgia. https://civil.ge/archives/642540. En outre, son agenda en matière de droits humains lui impose de marquer son désaccord et justifie des sanctions comme le gel du processus d’adhésion de la Géorgie. Le Parlement européen a également adopté une résolution appelant à l’organisation de nouvelles élections dans un délai d’un an sous supervision internationale renforcée[77]Silenská, N. (2024, December 17). Élections en Géorgie : la Slovaquie accuse le Parlement européen d’« ingérence ». Euractiv. … Continue reading. Des sanctions plus importantes à l’égard des responsables géorgiens ont été mises sur la table mais ont été bloquées par un véto de la Slovaquie et de la Hongrie [78]Ibid..

La situation est d’autant plus délicate qu’à force d’user de la logique sanction/récompense avec son partenariat oriental, l’Union européenne participe aux discours nationalistes l’accusant de chantage[79]Ibid.. La politique de promotion des droits LGBTQIA+ est particulièrement ciblée. La stratégie de l’Union européenne peut certainement être améliorée en se concentrant sur les besoins et les demandes prioritaires des communautés locales plutôt que d’imposer des normes abstraites sans tenir compte du contexte spécifique et de la manière dont elles sont reçues[80]Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. … Continue reading. Cette stratégie s’inscrirait davantage dans un mécanisme de développement des capacités que dans un mécanisme de conditionnalité ou de persuasion. En outre, l’idée ne serait plus l’ « européanisation » mais simplement le soutien des mouvements activistes locaux dans l’implantation de leurs propres priorités. Cette stratégie comprend néanmoins des barrières importantes. La première est la loi « influence étrangère » qui vise précisément les organisations associatives dont les financements viennent de l’étranger. La priorité est donc aujourd’hui d’assurer, au moins, la sécurité de ces activistes en leur accordant l’asile et au mieux de trouver solutions stratégiques pour les empouvoirer. 

Par ailleurs, l’arrivée de l’extrême droite à la Commission européenne ne présage pas nécessairement que l’Union continuera de se placer comme promotrice des droits LGBTQIA+ à l’avenir. La poursuite de son agenda géopolitique en matière de droits humains ne semble pour l’instant pas s’arrêter mais les tendances autoritaires grandissent partout dans le monde et au sein de plusieurs pays de l’Union. Il s’agira donc d’être attentif à la manière dont l’Union continuera d’exploiter les droits LGBTQIA+ comme instrument diplomatique et si cette utilisation ne révèlera pas davantage une politique « homonationaliste » qu’un réel soutien aux LGBTQIA+.

Les propos contenus dans cet article n’engagent que l’autrice.

Pour citer cet article: Estelle Houtart, « Géorgie : les droits LGBTQIA+ à l’épreuve d’un tournant anti-occidental », 13.04.2025, Institut du Genre en Géopolitique, https://igg-geo.org/2025/04/13/georgie-les-droits-lgbtqia-a-lepreuve-dun-tournant-anti-occidental/

References

References
1, 10, 15, 18 Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. https://css.ethz.ch/en/publications/css-analyses-in-security-policy/details.html?id=/n/o/3/4/no_349_georgia_at_a_crossroadsnr_349_geo
2 Désigne les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans, queer, intersexes, asexuelles ou toute personne ne se reconnaissant pas dans les normes hétérosexuelles et cisgenres.
3, 6 ILGA-Europe. (2024, September 18). Statement: The President of Georgia must not sign “On Family Values and the Protection of Minors” legislative package into law. https://www.ilga-europe.org/news/statement-the-president-of-georgia-must-not-sign-on-family-values-and-the-protection-of-minors-legislative-package-into-law/
4 Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. https://css.ethz.ch/en/publications/css-analyses-in-security-policy/details.html?id=/n/o/3/4/no_349_georgia_at_a_crossroadsnr_349_geo
5 Le Monde avec AFP. (2024, October 3). En Géorgie, la loi restreignant les droits LGBTQIA + promulguée par le président du Parlement. Le Monde.fr. https://www.lemonde.fr/international/article/2024/10/03/en-georgie-la-loi-restreignant-les-droits-lgbtqia-promulguee-par-le-president-du-parlement_6342511_3210.html
7 Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. https://css.ethz.ch/en/publications/css-analyses-in-security-policy/details.html?id=/n/o/3/4/no_349_georgia_at_a_crossroadsnr_349_geo
8, 11, 13, 30, 37, 38, 39, 48, 56, 57, 66, 70, 71, 73, 78, 79 Ibid.
9 Delcour, L. (2024). Un changement de paradigme ? L’Union européenne et l’Eurasie depuis la guerre en Ukraine, in de Tinguy, A. (dir.), Regards sur l’Eurasie. L’année politique 2023. Les Études du CERI, 273–274, 37-41. https://hal.science/hal-04459373v1
12 Delcour, L. (2024). Un changement de paradigme ? L’Union européenne et l’Eurasie depuis la guerre en Ukraine. In de Tinguy, A. (dir.), Regards sur l’Eurasie. L’année politique 2023. Les Études du CERI, 273–274, 37-41. https://hal.science/hal-04459373v1
14 La rédaction (2024, November 29). Géorgie : le gouvernement reporte sa demande d’adhésion à l’Union européenne. Le club des juristes. https://www.leclubdesjuristes.com/en-bref/georgie-le-gouvernement-reporte-sa-demande-dadhesion-a-lunion-europeenne-8101/
16 ILGA-Europe. (2024, September 18). Statement: The President of Georgia must not sign “On Family Values and the Protection of Minors” legislative package into law. https://www.ilga-europe.org/news/statement-the-president-of-georgia-must-not-sign-on-family-values-and-the-protection-of-minors-legislative-package-into-law/
17 Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. https://doi.org/10.1080/10758216.2021.1937228
19, 21, 76 Gutbrod, H. (2024, December 7). Defending the Future: Understanding Georgia’s Fall Protests. Civil Georgia. https://civil.ge/archives/642540
20, 35 Organization for Security and Co-operation in Europe. (2024, October 25). Georgia, Parliamentary Elections, 26 October 2024: Statement of Preliminary Findings and Conclusions. https://www.osce.org/odihr/elections/georgia/579346
22, 28 Conseil européen. Géorgie. https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/eu-georgia-relations/
23 European Neighbourhood Policy and Enlargement Negotiations (DG NEAR). Conditions for membership. https://neighbourhood-enlargement.ec.europa.eu/enlargement-policy/conditions-membership_en
24 Les critères politiques renvoient à la stabilité des institutions politiques à assurer la démocratie, l’Etat de droit, les droits humains et la protection des minorités.
25 Les critères économiques renvoient à la capacité à faire face à la concurrence du marché intérieur de l’Union.
26 Les critères concernant l’acquis communautaire renvoient à la transposition, dans la législation nationale, de l’ensemble du droit européen en vigueur.
27 T. Marktler. (2006, December). The Power of the Copenhagen Criteria. Croatian Yearbook of European Law and Policy, 2(2), 343-363. https://hrcak.srce.hr/file/44723
29 European Neighbourhood Policy and Enlargement Negotiations (DG NEAR). (2023, Novembre 8). Georgia Report 2023, https://neighbourhood-enlargement.ec.europa.eu/georgia-report-2023_en ; A titre de comparaison, la Moldavie a reçu des recommandations concernant  la Justice, la corruption, la dé-oligarchisation, le crime organisé, la participation de la société civile et les droits humains (voir https://neighbourhood-enlargement.ec.europa.eu/moldova-report-2023_en ) et l’Ukraine a reçu des recommandations concernant la corruption, le blanchiment d’argent, la dé-oligarchisation et la protection des minorités (voir https://neighbourhood-enlargement.ec.europa.eu/ukraine-report-2023_en ).
31 European Neighbourhood Policy and Enlargement Negotiations (DG NEAR). (2024, October 30). Georgia Report 2024, p. 26. https://neighbourhood-enlargement.ec.europa.eu/georgia-report-2024_en
32 Ibid., p. 25.
33 Venice Commission. (2024, June 21-22).  Georgia – Urgent Opinion on the Law of Georgia on Transparency of Foreign Influence, issued on 21 May 2024, pursuant to Article 14a of the Venice Commission’s Revised Rules of Procedure, endorsed by the Venice Commission at its 139th Plenary Session. https://www.venice.coe.int/webforms/documents/default.aspx?pdf=CDL-AD(2024)020-e&lang=fr
34 Venice Commission. (2024, June 21-22). Géorgie – Avis sur le projet de loi constitutionnelle sur la protection des valeurs familiales et des mineurs, adopté par la Commission de Venise lors de sa 139e session plénière. https://www.venice.coe.int/webforms/documents/?pdf=CDL-AD(2024)021-f
36 Shevtsova, M. (2020). Fighting “Gayropa”: Europeanization and Instrumentalization of LGBTI Rights in Ukrainian Public Debate. Problems of Post-Communism, 67(6), 500–510. https://doi.org/10.1080/10758216.2020.1716807
40, 42 Teffer. (2015, Novembre 13). Ukraine gives equal rights to gay workers, to please Brussels. euobserver. https://euobserver.com/lgbti/131098
41 Shevtsova, M. (2020). Fighting “Gayropa”: Europeanization and Instrumentalization of LGBTI Rights in Ukrainian Public Debate. Problems of Post-Communism, 67(6), 500–510. https://doi.org/10.1080/10758216.2020.1716807
43, 46, 72 Shevtsova, M. (2020). Fighting “Gayropa”: Europeanization and Instrumentalization of LGBTI Rights in Ukrainian Public Debate. Problems of Post-Communism, 67(6), 500–510. https://doi.org/10.1080/10758216.2020.1716807
44, 51, 63, 65, 69, 80 Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. https://doi.org/10.1080/10758216.2021.1937228
45, 47 K. Slootmaeckers, (2017). The litmus test of pride: analysing the emergence of the Belgrade “Ghost” pride in the context of EU accession. East European Politics, 33(4), 517–535. https://doi.org/10.1080/21599165.2017.1367290
49 Ziemer, U., and Roberts, S. P. (2024). Populist political masculinities, gender equality, and norm contestation in Armenia and Georgia. International Feminist Journal of Politics, 26(4), 804. https://doi.org/10.1080/14616742.2023.2298692
50 Oleg, R. and Ryabova, T. (2014, February 5). The decline of Gayropa? How Russia intends to save the world. Eurozine. https://www.eurozine.com/the-decline-of-gayropa/
52 Ici utilisé comme terme générique pour désigner la haine à l’égard des personnes LGBTQIA+.
53 Ziemer, U., and Roberts, S. P. (2024). Populist political masculinities, gender equality, and norm contestation in Armenia and Georgia. International Feminist Journal of Politics, 26(4), 800-803. https://doi.org/10.1080/14616742.2023.2298692
54 Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. https://doi.org/10.1080/10758216.2021.193722
55, 58 Tskhadadze, T. (2017). “ »The West” and Georgian “Difference”: Discursive Politics ofGender and Sexuality in Georgia”. In Gender in Georgia. Feminist Perspectives on Culture, Nation, and History in the South Caucasus, edited by Maia Barkaia and Alisse Waterston, 47-56. New York; Oxford: Berghan Books.
59 Luciani, L. (2021). Where the Personal is (Geo)Political: Performing Queer Visibility in Georgia in the Context of EU Association. Problems of Post-Communism, 70(2), 197–208. https://doi.org/10.1080/10758216.2021.1937228 https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/ip_12_561
60 Ibid. ; Füle, S. (European Commissioner for Enlargement and European Neighbourhood Policy) (2014, March 4). EU-Georgia: About myths and true benefits of Association Agreement. https://ec.europa.eu/commission/presscorner/api/files/document/print/en/speech_14_180/SPEECH_14_180_EN.pdf
61 Merlin, A. (2024). La Géorgie à l’heure de l’invasion de l’Ukraine : le dissensus entre pouvoir et société. In de Tinguy, A. (dir.), Regards sur l’Eurasie. L’année politique 2023. Les Études du CERI, 273–274, 31–36. https://hal.science/hal-04459361v1
62, 74 Perović, J. (2024). Georgia at a Crossroads. CSS Analyses in Security Policy, 349. https://css.ethz.ch/en/publications/css-analyses-in-security-policy/details.html?id=/n/o/3/4/no_349_georgia_at_a_crossroadsnr_349_geo
64 Ziemer, U., and Roberts, S. P. (2024). Populist political masculinities, gender equality, and norm contestation in Armenia and Georgia. International Feminist Journal of Politics, 26(4), 800-803. https://doi.org/10.1080/14616742.2023.2298692
67 ILGA-Europe. (2024, September 18). Statement: The President of Georgia must not sign “On Family Values and the Protection of Minors” legislative package into law. https://www.ilga-europe.org/news/statement-the-president-of-georgia-must-not-sign-on-family-values-and-the-protection-of-minors-legislative-package-into-law/
68, 75 EURACTIV France avec AFP. (2024, Novembre 29). Géorgie : la police tire des gaz lacrymogènes contre des manifestants pro-UE. Euractiv. https://www.euractiv.fr/section/elargissement/news/georgie-la-police-tire-des-gaz-lacrymogenes-contre-des-manifestants-pro-ue/
77 Silenská, N. (2024, December 17). Élections en Géorgie : la Slovaquie accuse le Parlement européen d’« ingérence ». Euractiv. https://www.euractiv.fr/section/elargissement/news/elections-en-georgie-la-slovaquie-accuse-le-parlement-europeen-d-ingerence/