La place de l’intersectionnalité dans les séries TV états-uniennes : la nouvelle génération de représentation des personnages Latina 2/3

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La place de l’intersectionnalité dans les séries TV états-uniennes : la nouvelle génération de représentation des personnages Latina 2/3

14.10.2021

Lysiane Colin

Qui ne cherche pas à se voir représenter à la TV en grandissant ? L’influence de la représentation dans les médias joue un rôle crucial dans la perception de soi et des autres. Alors que la communauté Latinx[1]Latinx est un mot utilisé aux États-Unis par la communauté issue de l’immigration d’Amérique Latine, immigrée aux États-Unis, afin de se décrire dans une plus grande inclusion genrée … Continue reading représente la plus grande minorité raciale aux États-Unis, celle-ci est presque inexistante sur nos écrans en tant que personnage principal. Et lorsqu’elle y est représentée, ces personnages sont pour la plupart criblés de stéréotypes négatifs. Cependant, certaines séries états-uniennes des années 2000 s’opposent à ces représentations en proposant de nouvelles narrations célébrant la diversité de la communauté Latinx. Cet article, qui fait partie d’un dossier sur la représentation de l’intersectionnalité[2]L’intersectionnalité est un terme développé par Kimberlé Crenshaw en 1989. Il définit l’expérience et l’identité de tout individu à l’intersection de plusieurs catégories sociales … Continue reading dans le monde télévisuel états-unien contemporain, revient sur deux séries qui se sont démarquées par leurs représentations innovatrices de personnages Latina[3]Latina est un terme qui définit les femmes d’origine d’Amérique Latine immigrée aux États-Unis depuis une ou plusieurs générations. Ce terme sera utilisé lorsqu’on parlera des … Continue reading.

Le manque de représentation des personnages Latina sur nos écrans

Il existe une grande disparité entre la réalité et les représentations médiatiques des minorités raciales, de genre et sexuelles[4]Lysiane Colin, « La place de l’intersectionnalité dans les séries TV états-uniennes : la diversité dans le monde de Shondaland 1/2 », Institut du Genre en Géopolitique, 24 juin … Continue reading. Concernant la visibilité des Latinx, iels ne forment que 3-4% des personnages télévisées des séries diffusées à l’heure de grande écoute aux États-Unis[5]Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », Elon Journal of Undergraduate Research in Communications, vol.8, n°1, 2017, p.35..  Cette communauté représente pourtant plus de 16% de la population étasunienne, se classant ainsi en tête des minorités raciales du pays[6]Ibid.. En 2018, alors que 30 programmes sont choisis chaque année par les grandes chaînes de télévision états-uniennes, seulement 10 séries sur toutes celles diffusées contenaient un personnage Latinx dans un rôle principal[7]Nicole Acevedo, « TV shows struggle to reflect U.S. Latino presence. Will it get better? », 24 mai 2019, NBC News, … Continue reading.

Même si le nombre de personnage Latinx a augmenté depuis le début des années 2000, le monde télévisuel reste loin de la réalité. Les réalisateur.rice.s doivent continuer à créer des séries mettant en avant des personnages Latinx au centre de leur narration et le public doit continuer de demander à ce que ces programmes restent à l’écran. Felix Sanchez, co-fondateur du National Hispanic Foundation for the Arts, révèle le fait que « c’est la responsabilité de chacun, des consommateurs aux grands patrons, de refermer l’écart[8]Ibid. ».

La représentation médiatique est fondamentale dans la construction de l’individu. Elle permet de se voir et d’entrevoir les possibilités qui s’offrent à soi-même, même s’il s’agit d’une fiction. Elle ouvre les yeux et permet de rêver, de se projeter dans un monde de possibilités. Notons que les représentations influencent aussi le public qui les regardent, elles peuvent changer les perceptions que les individus se font d’un groupe de personne. Les médias n’ont pas qu’une fonction de divertissement, ils perpétuent ou remettent aussi en question les perceptions préexistantes du public[9]Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin ». p.36.. La communauté Latinx est de plus en plus consciente de son manque de représentation au sein du média télévisuel et des répercussions que cela cause sur leur perception de soi et des autres[10]Op. cit. Nicole Acevedo, « TV shows struggle to reflect U.S. Latino presence. Will it get better? ».. Le fait d’être toujours criminalisé.e ou subalterne amène à penser qu’il n’existe pas d’autres issues ; l’hypersexualisation des femmes Latina amène des individus à penser que toutes les femmes de cette communauté sont perçues ainsi dans la réalité, sans chercher à les voir au-delà de ce stéréotype construit par les médias.

Les stéréotypes négatifs attachés à la communauté Latinx dans les séries états-uniennes
La communauté Latinx souffre d’une représentation biaisée et négative qui ne représente pas la réalité dans laquelle elle vit. Au sein des 3-4% de représentation télévisuelle, seulement 11% des personnages Latinx occupent un métier en haut de l’échelle sociale[11]Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », p.35.. Les idées reçues et stéréotypes qui reviennent le plus concernent des portraits de criminel[12]Les séries policières des années 2000 représentent un taux impressionnant de personnages Latino – rôles majoritairement masculin – dans les personnages incarcérés, ou auteurs … Continue reading, de Latin Lover[13]Le personnage d’un Latin Lover est représenté par un homme Latino suave, séduisant, beau, sexy, faisant fondre les femmes et très « masculin » dans ses traits et ses comportements., de femme hypersexualisée[14]Le stéréotype de la femme hypersexualisée est notamment représenté au travers du personnage de Gabrielle dans Desperate Housewives (2004-2012), interprété par Eva Longoria. Non seulement elle … Continue reading, de comique de service[15]Par exemple le personnage de Gloria dans Modern Family (2009-2020), jouée par Sofia Vergara. Même si elle représente l’une des premières représentation Latina à la télévision et qu’elle … Continue reading, d’ouvrier[16]Le rôle de Jennifer Lopez dans Maid in Manhattan (2003) est un exemple de ce type de stéréotype. Jennifer Lopez joue le rôle de Marisa, une jeune femme qui travaille comme femme de chambre dans … Continue reading, etc[17]Gwen Aviles, « The Impact Of ‘Jane The Virgin’ Cannot Be Overstated », 28 septembre 2020, HuffPost, … Continue reading. D’après une étude réalisée en 2014, un tiers des apparitions de personnage Latinx sont liées « à des activités illégales », 44,7% des personnages ne sont pas crédités au générique ou n’ont pas de nom, et 69% des rôles de personnel de maison sont joués par des Latina depuis 1996[18]Op. cit. Nicole Acevedo, « TV shows struggle to reflect U.S. Latino presence. Will it get better? »..

Ces rôles stéréotypés dépeignent un portrait universel, comme si la communauté était uniforme : un groupe de personnes ne parlant pas anglais et issu de l’immigration illégale[19]Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », p.36..

Afin de limiter ces représentations négatives, un nombre important d’acteur.rice.s, de réalisateur.rice.s et de scénaristes Latinx déploient des efforts pour une meilleure représentation télévisuelle. Iels exigent un portrait authentique de leur communauté et soutiennent les séries avec des représentations positives, afin de montrer que ces portraits ont leur place dans le monde télévisuel d’aujourd’hui[20]Op. cit. Nicole Acevedo, « TV shows struggle to reflect U.S. Latino presence. Will it get better? ».. Via une représentation positive, la perception du public change pour le mieux, délaissant ses opinions discriminantes, et permettant aux minorités discriminées de s’identifier de façon positive. Gina Rodriguez, l’actrice de Jane the Virgin, souligne ce besoin d’avoir des représentations positives : « Je sais à quel point j’ai été affectée de ne jamais voir de modèles positifs ayant ma couleur de peau. J’ai donc décidé d’utiliser mon art pour changer la situation et pour jouer des rôles de personnages positifs qui permettraient aux personnes de se voir de façon différente[21]Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », p.36. ».

À cette fin, certaines séries se réapproprient des stéréotypes pour en faire une image plus nuancée, alors que d’autres innovent afin d’offrir de nouvelles représentations diversifiées et authentiques. Pour comprendre comment ces deux optiques sont diffusées à la télévision, cet article revient sur deux séries qui ont marquées les chaines télévisées états-uniennes pour leurs représentations de personnage principal Latina : Ugly Betty et Jane the Virgin. Mais en quoi ces séries proposent-elles de nouvelles possibilités de représentation Latina dans le monde télévisuel états-unien des années 2000 ?

Ugly Betty : le début de la représentation positive des femmes Latina

Ugly Betty est une série états-unienne créée par Silvio Horta, diffusée sur la chaine ABC de 2006 à 2010, qui est basée sur la télénovela colombienne Yo soy Betty, la fea[22]Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », p.37.. C’est l’un des premiers programmes mettant en scène une famille Latinx au centre de sa narration. Le personnage principal, incarné par America Ferrerra, défie les stéréotypes Latina : Betty Suarez est une jeune femme issue de la classe ouvrière qui vient de terminer ses études universitaires et se lance dans une carrière professionnelle au sein d’un magazine de mode.

Affiche de la saison 1 et 4 d’Ugly Betty, Betty étant joué par America Ferrera. Source : Disney+.com

Son personnage incarne une révolution dans le type de femmes représentées à la télévision à cette époque[23]Gwen Aviles, « ‘Ugly Betty’ Gave Television An Unlikely Latina Heroine », HuffPost, 1er décembre 2020, … Continue reading. Son éthique professionnelle lui fait gagner le respect de ses collègues, non l’évolution de son style. Ce portrait du corps féminin fait penser au mouvement du body positivity[24]Le body positivity, ou body positive en français, est un mouvement qui prône l’acception de tous les corps féminins comme ils sont. Il est créé aux Etats-Unis en 1996 par Connie Sobczak … Continue reading qui s’est développé depuis 2012 sur internet : la célébration des corps féminins comme ils sont, leur diversité et leur différence intersectionnelle, et la remise en question des normes de beauté traditionnelles.

Du côté de la représentation Latina, le personnage de Betty est « américanisé » : elle est née aux États-Unis, parle parfaitement anglais et pas un mot d’espagnol, elle est ancrée dans la culture états-unienne et évolue au sein d’un milieu professionnel blanc. Toutefois, elle se situe à un entre deux : ses origines ne lui permettent pas d’être acceptée totalement dans son environnement de travail, mais elle est trop « américanisée » que pour se sentir chez elle dans le pays d’origine de ses parents[25]Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », p.43.. Cette dualité permet d’avoir un personnage Latina multiculturel, complexe et multidimensionnel.

La série célèbre l’émancipation d’une femme Latina au travers de son voyage intérieur, de ses aspirations professionnelles et de sa prise de confiance en soi. Betty offre une version alternative du succès, basée sur la réussite professionnelle d’une jeune femme défiant les stéréotypes physiques féminins, qui prend son futur en main et qui trouve la consécration via ses amis, sa famille et son travail[26]Ibid.. Le programme introduit aussi des personnages multidimensionnels au travers de la famille de Betty, son père Ignacio, sa sœur Hilda et son neveu Justin,  qui permettent de montrer la diversité de la communauté Latinx et d’offrir des portraits au travers desquels celle-ci peut s’identifier. La série Ugly Betty reste ancrée dans son temps : le casting n’est que partiellement Latinx, le monde dans lequel la protagoniste évolue reste blanc et la représentation des femmes Latina est soit « américanisée » au travers de Betty, soit partiellement stéréotypée via le personnage d’Hilda, qui au contraire de Betty, représente des normes de beauté féminines plus traditionnelles, n’a pas suivi d’études supérieures car elle est tombée enceinte au lycée, et bien qu’elle ait son propre business – un salon de beauté -, son arc narratif tourne majoritairement autour d’histoires d’amour.

Ugly Betty est donc un premier pas dans la direction d’une représentation positive et diversifiée des personnages Latina.

Jane the Virgin : vers une représentation multiple des femmes Latina

Jane the Virgin est adaptée d’une télénovela vénézuélienne du même nom, créée par Perla Farías[27]Perla Farías est une scénariste et productrice de nationalité vénézuélienne.. La série états-unienne est développée par Jennie Snyder Urman[28]Jennie Snyder Urman est une scénariste et productrice de nationalité étasunienne. et diffusée sur la chaine CW de 2014 à 2019. Jane the Virgin est le premier programme de la chaîne à être composé d’un casting majoritairement Latinx[29]Ibid., p.35.. Au travers du casting, la série rend non seulement la communauté Latinx visible, mais elle en fait son point de vue dominant via une myriade de personnages, féminins et masculins, issus de milieux et de classes différents, démontrant la complexité et la variété de la culture Latinx[30]Diana Martinez, « Jane the Virgin Proves Diversity Is More Than Skin Deep », The Atlantic, 19 octobre 2015, … Continue reading. La série intègre aussi des références culturelles, notamment via l’utilisation du format de la télénovela dans la construction narrative (rebondissements, triangles amoureux, réalisme magique, etc.) et au sein de la narration (comme un élément liant la famille de Jane, le personnage principal joué par Gina Rodriguez), afin de célébrer et reconnaître cette culture[31]Paola Brembilla et Lucia Tralli, « ‘With 22 episodes a year’ Searching for Quality in US Network Television: the Cases of The Good Wife, Brooklyn Nine-Nine and Jane the Virgin », Comunicazioni … Continue reading.

La narration de Jane The Virgin tourne autour de trois personnages féminins : Jane, sa mère Xiomoara et sa grand-mère, Alba. La série utilise la thématique de la famille afin de représenter différents types de personnages Latina[32]Juan Piñón, « Jane the Virgin. The Pursuit of New Latina/o Representations », Fall 2017, ReVista Harvard Review of Latin America, p.23-24, URL : … Continue reading. Au départ, les représentations d’Alba et Xiomara sont des archétypes qui enferment les personnages dans une vision très duale et opposée, faisant référence à deux façons de voir les Latina. Alba est une femme ayant fui son pays d’origine d’Amérique latine pour fonder une famille aux États-Unis, mais qui n’a jamais oublié les valeurs de son pays : elle est catholique et a une vision religieuse de la sexualité et du mariage, qui fait référence au mythe de « la vierge et de la putain »[33]Ibid.. Au contraire, sa fille, Xiomara, représente une femme plus féminine, qui se rapproche du stéréotype de la Latina sexualisée, et qui est tombée enceinte jeune. Toutefois, ces personnages se complexifient au fil des épisodes : Alba découvre une nouvelle fois l’amour et la sexualité, et Xiomara s’émancipe financièrement et professionnellement et c’est elle qui décide de son corps et de ses choix. Quant à Jane, elle se situe à l’entre deux : elle a appris les préceptes catholiques de sa grand-mère, notamment concernant le sexe avant le mariage, mais se rapproche aussi de sa mère par d’autres aspects, un regard nuancé sur la sexualité[34]Ibid.. Au fil des saisons, Jane développe ses propres opinions, créant de nouvelles possibilités concernant l’identité d’une femme Latina – notamment au travers de son parcours professionnel et amoureux.

Ces trois représentations permettent de repenser la perception d’une femme Latina d’un point de vue social, culturel et linguistique[35]Ibid.. Jane the Virgin démontre que ces portraits peuvent exister au sein d’une même narration et souligne la complexité de chacune au lieu de l’impossibilité de dialogue[36]Op. cit., Diana Martinez, « Jane the Virgin Proves Diversity Is More Than Skin Deep »..

Xiomara (Andrea Navedo), Jane (Gina Rodriguez) et Alba (Ivonne Coll), les trois femmes de la famille Villanueva. Source : Teen Vogue.com.

La sexualité et la maternité occupent un rôle central dans la série. Les trois femmes en parlent ouvertement entre elles, ce qui représente une nouveauté sur le petit écran. Même si leurs avis diffèrent (sur la question de l’avortement ou du sexe avant le mariage), la visibilisation de ces thématiques dément l’idée reçue par les médias selon laquelle la communauté Latinx perçoit ces thèmes comme tabou[37]Denicia Sam Cadena, « Opinion: ‘Jane the Virgin’ Abortion Storyline a Nuanced Latinx Portrayal », NBC News, 27 octobre 2016, … Continue reading. D’après une étude de 2016 sur les droits reproductifs des femmes dans la communauté Latinx : 83% des personnes interrogées répondent qu’elles respectent le choix de la femme quel qu’il soit, et 77% disent qu’iels soutiendront ce choix[38]Ibid.. Cette réalité renvoie à Jane the Virgin où les discussions sur le sujet sont nuancées et reflètent la réalité de terrain, faisant de Jane the Virgin une série novatrice.

Quant au personnage de Jane, elle représente une nouvelle forme de Latina : une femme conjuguant sa vie de famille avec sa vie amoureuse et son travail. Tout comme Betty Suarez, Jane suit son rêve et en fait sa profession, en apprenant à former sa propre identité basée sur ses choix. Au fil des saisons, Jane s’émancipe de sa famille afin de suivre son propre chemin, tout en restant proche de celle-ci, ce qui permet de voir une multitude de personnages Latina dans leur complexité et leur évolution.

Conclusion : quel avenir pour les personnages Latina ?

Ugly Betty et Jane the Virgin sont deux séries qui remettent en question les stéréotypes couramment utilisés pour définir la communauté Latinx. Elles s’inspirent de ces stéréotypes négatifs pour les contester et montrer que les personnages Latina sont plus complexes et nuancés que ce qui a été diffusé auparavant. Betty Suarez se démarque par son physique atypique et le professionnalisme qu’elle met dans son métier afin de réussir dans sa voie. Jane Villanueva, par sa relation avec sa mère et sa grand-mère, est la nouveauté du portrait Latina qui lui permet à la fin de la série d’avoir une vie familiale et professionnelle telle qu’elle l’a décidé.

Elles permettent à la communauté Latinx d’être représentée positivement et de voir les perspectives qui s’offrent à elle. Les deux actrices, America Ferrerra et Gina Rodriguez, font d’ailleurs partie du groupe Fiercely Latina (au côté de Eva Longoria ou de Rosario Dawson), un groupe de jeunes femmes Latina à Hollywood qui luttent pour une représentation plus importante des Latinx devant et derrière les caméras des petits et grands écrans[39]Geraldine Cols Azócar, « Proud to be Latinx and represent: ‘One Day at a Time’s’ Isabella Gomez », NBC News, 21 septembre 2018, … Continue reading.

Toutefois, ces deux personnages se ressemblent. Jane the Virgin s’inscrit majoritairement dans une hétéronormativité pour ses personnages Latina, et reste assez traditionnelle dans la représentation de l’amour. Ugly Betty présente une famille Latinx dans un monde très blanc, le personnage principal étant « américanisée ». Il serait intéressant de se pencher sur des séries qui mettent en scène d’autres types de représentations des personnages Latina, notamment au travers de la question de l’orientation sexuelle. Ces représentations continuent-elles de remettre en question les stéréotypes ? Invisibilisent-elles une caractéristique pour en mettre une autre en lumière ? Proposent-elles de nouvelles représentations de l’identité Latina ? Le prochain article analysera quelques séries qui introduisent des personnages Latina lesbiennes et bisexuelles afin de poursuivre l’analyse de l’intersectionnalité dans les séries états-uniennes contemporaines.

Pour citer cet article : Lysiane Colin, “La place de l’intersectionnalité dans les séries TV états-uniennes : la nouvelle génération de représentation des personnages Latina 2/3”, 14.10.2021, Institut du Genre en Géopolitique.

Les propos contenus dans cet article n’engagent que l’auteur.ice.

References

References
1 Latinx est un mot utilisé aux États-Unis par la communauté issue de l’immigration d’Amérique Latine, immigrée aux États-Unis, afin de se décrire dans une plus grande inclusion genrée (Latino étant utilisé pour parler des hommes et Latina des femmes). Ce terme sera préféré à ses synonymes genrés lorsqu’on parlera de la communauté en général, afin d’utiliser les mots par lesquels les individus se définissent eux-mêmes.
2 L’intersectionnalité est un terme développé par Kimberlé Crenshaw en 1989. Il définit l’expérience et l’identité de tout individu à l’intersection de plusieurs catégories sociales (genre, race, classe, orientation sexuelle, handicap, etc.) ; la globalité de ces catégories, ensemble, définissant l’identité d’une personne.
3 Latina est un terme qui définit les femmes d’origine d’Amérique Latine immigrée aux États-Unis depuis une ou plusieurs générations. Ce terme sera utilisé lorsqu’on parlera des personnages féminins.
4 Lysiane Colin, « La place de l’intersectionnalité dans les séries TV états-uniennes : la diversité dans le monde de Shondaland 1/2 », Institut du Genre en Géopolitique, 24 juin 2021, https://igg-geo.org/?p=3662.
5 Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », Elon Journal of Undergraduate Research in Communications, vol.8, n°1, 2017, p.35.
6, 8, 26, 33, 34, 35, 38 Ibid.
7 Nicole Acevedo, « TV shows struggle to reflect U.S. Latino presence. Will it get better? », 24 mai 2019, NBC News, https://www.nbcnews.com/news/latino/producers-latino-themed-tv-shows-fight-stay-n989561.
9 Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin ». p.36.
10, 18, 20 Op. cit. Nicole Acevedo, « TV shows struggle to reflect U.S. Latino presence. Will it get better? ».
11 Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », p.35.
12 Les séries policières des années 2000 représentent un taux impressionnant de personnages Latino – rôles majoritairement masculin – dans les personnages incarcérés, ou auteurs d’actes illégaux.
13 Le personnage d’un Latin Lover est représenté par un homme Latino suave, séduisant, beau, sexy, faisant fondre les femmes et très « masculin » dans ses traits et ses comportements.
14 Le stéréotype de la femme hypersexualisée est notamment représenté au travers du personnage de Gabrielle dans Desperate Housewives (2004-2012), interprété par Eva Longoria. Non seulement elle est perçue comme un objet sexuel par les personnages masculins, mais son personnage représente aussi une jeune femme qui se marie avec des hommes riches afin d’avoir un statut social élevé sans pour autant devoir travailler.
15 Par exemple le personnage de Gloria dans Modern Family (2009-2020), jouée par Sofia Vergara. Même si elle représente l’une des premières représentation Latina à la télévision et qu’elle évolue vers un personnage plus complexe, Gloria reste une femme bruyante, avec un accent très prononcé, qui se retrouve au centre des blagues notamment pour son origine colombienne. Elle est aussi d’une grande beauté et est sexualisée via ses vêtements et le regard des hommes sur elle.
16 Le rôle de Jennifer Lopez dans Maid in Manhattan (2003) est un exemple de ce type de stéréotype. Jennifer Lopez joue le rôle de Marisa, une jeune femme qui travaille comme femme de chambre dans un hôtel new yorkais. Bien qu’elle soit un personnage droit qui travaille afin d’élever son fils, elle est catégorisée « femme de ménage ».
17 Gwen Aviles, « The Impact Of ‘Jane The Virgin’ Cannot Be Overstated », 28 septembre 2020, HuffPost, https://www.huffpost.com/entry/jane-the-virgin-series-finale-latinx-representation_n_5d4486c2e4b0acb57fcc4b1a.
19, 21 Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », p.36.
22 Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », p.37.
23 Gwen Aviles, « ‘Ugly Betty’ Gave Television An Unlikely Latina Heroine », HuffPost, 1er décembre 2020, https://www.huffpost.com/entry/ugly-betty-silvio-horta-latino-representation_n_5e18a3dfc5b6da971d14ffd9.
24 Le body positivity, ou body positive en français, est un mouvement qui prône l’acception de tous les corps féminins comme ils sont. Il est créé aux Etats-Unis en 1996 par Connie Sobczak et Elizabeth Scott et acquiert une plus grande notoriété grâce aux réseaux sociaux. Plus d’information : Alexandra Sastre, « Towards a Radical Body Positive », Feminist Media Studies, vol.14, n°6,‎ 24 février 2014, p.929-943.
25 Op. cit. Caroline Grell, « The Fight for Equality: The Role of Latino Stereotypes in Jane the Virgin », p.43.
27 Perla Farías est une scénariste et productrice de nationalité vénézuélienne.
28 Jennie Snyder Urman est une scénariste et productrice de nationalité étasunienne.
29 Ibid., p.35.
30 Diana Martinez, « Jane the Virgin Proves Diversity Is More Than Skin Deep », The Atlantic, 19 octobre 2015, https://www.theatlantic.com/entertainment/archive/2015/10/jane-the-virgin-telenovelas/409696/.
31 Paola Brembilla et Lucia Tralli, « ‘With 22 episodes a year’ Searching for Quality in US Network Television: the Cases of The Good Wife, Brooklyn Nine-Nine and Jane the Virgin », Comunicazioni sociali, n°2, 2015, p.148.
32 Juan Piñón, « Jane the Virgin. The Pursuit of New Latina/o Representations », Fall 2017, ReVista Harvard Review of Latin America, p.23-24, URL : https://archive.revista.drclas.harvard.edu/book/jane-virgin.
36 Op. cit., Diana Martinez, « Jane the Virgin Proves Diversity Is More Than Skin Deep ».
37 Denicia Sam Cadena, « Opinion: ‘Jane the Virgin’ Abortion Storyline a Nuanced Latinx Portrayal », NBC News, 27 octobre 2016, https://www.nbcnews.com/news/latino/opinion-jane-virgin-abortion-storyline-nuanced-latinx-portrayal-n673286.
39 Geraldine Cols Azócar, « Proud to be Latinx and represent: ‘One Day at a Time’s’ Isabella Gomez », NBC News, 21 septembre 2018, https://www.nbcnews.com/news/latino/proud-be-latinx-represent-one-day-time-s-isabella-gomez-n911646.