L’engagement des femmes dans la diplomatie latino-américaine et leurs associations institutionnelles au sein des ministères des Affaires étrangères (1/2)

12/08/2024

Sofia Rocco Stainsack Rocha

En 2022, l’Assemblée générale des Nations unies a officiellement désigné le 24 juin comme la Journée internationale des femmes dans la diplomatie, célébrant ainsi de manière significative la contribution des femmes à un domaine historiquement dominé par les hommes à travers le monde^[1]United Nations. (n.d.). International Day of Women in Diplomacy. United Nations. Récupéré le 4 juillet, 2024, de https://www.un.org/en/observances/women-in-diplomacy-day. Cette proclamation symbolique marque un pas important vers la reconnaissance et la valorisation du rôle crucial des femmes dans les affaires internationales et la diplomatie, secteurs où elles ont souvent été sous-représentées et où leur présence est essentielle pour garantir une représentation équitable et inclusive des perspectives et des intérêts mondiaux^[2]Eurocid. (n.d.). Dia Internacional das Mulheres na Diplomacia. Récupéré le 4 juillet, 2024, de https://eurocid.mne.gov.pt/eventos/dia-internacional-das-mulheres-na-diplomacia. Néanmoins, la présence des femmes dans la diplomatie, y compris en Amérique latine, est encore timide et doit faire l’objet d’avancées institutionnelles et culturelles au sein des ministères des Affaires étrangères de la région.

À cette fin, certains pays d’Amérique latine, comme le Mexique, le Chili et la Colombie, ont récemment mis en place des politiques étrangères féministes, avec le soutien de femmes diplomates originaires de ces pays, dans le but d’atténuer ces inégalités et d’utiliser des perspectives de genre lors de l’élaboration de leur politique étrangère. De plus, des réseaux créés par des femmes diplomates ont commencé à se développer au sein des ministères des Affaires étrangères de certains pays de la région, comme le Brésil, l’Argentine et le Paraguay, pour la mise en œuvre d’avancées institutionnelles, présenter des mesures formelles pour favoriser l’entrée et la promotion des femmes dans la carrière diplomatique et dénoncer les inégalités au niveau des institutions. Ainsi, quelles sont les activités et objectifs des associations de femmes diplomates dans les pays d’Amérique latine où elles sont présentes ?

Le sujet est analysé dans le cadre d’un dossier composé de deux parties. Cette première partie a pour but d’esquisser la situation actuelle des associations des femmes diplomates en Amérique latine, leur formation, leurs buts et les actions qu’elles mènent. Elle est suivie par une deuxième partie, qui examine le carrefour du genre et de la diplomatie de façon plus large dans la région, en mettant en lumière les principaux jalons et évolutions dans ce domaine au cours des dernières décennies, les défis majeurs. Le dossier conclut par la présentation de quelques recommandations à adopter dans ce contexte.

La présence de femmes diplomates en Amérique latine

Malgré l’augmentation de la présence des femmes dans le service diplomatique en Amérique latine, la situation dans la région reste alarmante en ce qui concerne l’inclusion des femmes et la parité de genre dans les ministères des Affaires étrangères, en particulier dans les postes de haut rang et de direction. Quelques données illustrent cette réalité.  Il faudrait attendre 162 ans pour atteindre la parité politique à l’échelle mondiale, y compris le service diplomatique. Actuellement, seulement 20,54 % des ambassadeur·ices et des représentant·es permanent·es sont des femmes à l’échelle globale ^[3]Programa de Entrenamiento en el Fortalecimiento de la Alta Dirección Pública en América Latina (PEFAL). (2023). Las mujeres en la diplomacia: Spoiler alert, están infrarrepresentadas. Récupéré … Continue reading. Ce chiffre monte à 31 % dans les pays qui ont adopté une politique étrangère féministe, mais aucun pays en dehors du Canada, où les femmes représentent 51 % des diplomates, n’a encore atteint la parité femmes-hommes dans son corps diplomatique. En Amérique latine, le Chili compte 24 % de femmes diplomates et le Mexique en compte 23 %, deux pays qui ont récemment adopté des diplomaties féministes. Parmi les 20 pays leaders en matière de représentation féminine en tant qu’ambrassadrices, seuls six sont latino-américains : la Nicuarágua (5e) avec 48% de participation, les Bahamas (7e) avec 45,5%, El Salvador (11e) avec 39%, la Jamaïque (12e) avec 38%, Cuba (16e) avec 35% et le Panama (17e) avec 33,5%^[4] Anwar Gargash Diplomatic Academy. (2023). Women in diplomacy. Récupéré de https://www.agda.ac.ae/docs/default-source/2023/women-diplomacy.pdf?sfvrsn=6189673b_3. En outre, la situation régionale est particulièrement difficile pour les femmes noires, autochtones, quilombolas (peuples historiques afro-brésiliens), handicapées et les mères, qui font face à des obstacles supplémentaires dans leur parcours professionnel. Cette réalité souligne l’urgence d’analyser la diplomatie et les relations internationales à travers le prisme de genre.

Afin d’atténuer ces disparités dans la représentation et l’inclusion des femmes dans le corps diplomatique, certaines diplomates et femmes qui travaillent dans les organisations internationales dans les pays d’Amérique latine, notamment ceux qui ne possèdent pas une politique étrangère officiellement féministe, ont commencé à développer des réseaux de femmes diplomates qui s’entraident et prennent position sur les questions de genre au sein des ministères des Affaires étrangères de leurs pays respectifs.

Les associations latino-américaines des femmes diplomates

En commençant par le Brésil, l’Associação de Mulheres Diplomatas Brasileiras (AMDB; Association des femmes diplomates brésiliennes), fondée officiellement en 2023 après plus de dix ans de mobilisation au sein du Ministère des Affaires étrangères (MRE) du pays, connu aussi comme l’Itamaraty, est le fruit d’une action collective du groupe des femmes diplomates. Composée de femmes actives ou retraitées au MRE, cette association vise principalement à rendre l’Itamaraty plus équitable et représentatif, et à dénoncer les inégalités de genre au sein du MRE et dans les actions menées dans le cadre de la politique étrangère par les gouvernements en au pouvoir, indépendamment de ses positions politiques. De plus, l’AMDB a comme objectif central de promouvoir l’entrée et l’avancement des femmes dans la carrière diplomatique, afin que l’Itamaraty reflète fidèlement la diversité de la population brésilienne^[5]Associação Brasileira de Mulheres de Carreira Diplomática. (n.d.). Mulheres Diplomatas. Récupéré le 4 juillet, 2024, de https://mulheresdiplomatas.org/quem-somos. Selon des données de 2023 de l’Itamaraty, malgré les 213 missions diplomatiques brésiliennes dans le monde, seules 34 sont dirigées par des femmes^[6]G1. (2023, September 11). O Assunto #1042: Mulheres no degrau debaixo do funcionalismo. G1. Récupéré de … Continue reading.

Conscientes de la diversité des expériences des femmes diplomatiques, qu’elles soient issues de différentes ethnies, noires, quilombolas, autochtones, d’une minorité, ainsi que les handicapées et les personnes LGBTI+, ou personnes de diverses régions du pays, les membres de l’AMDB adoptent une approche intersectionnelle^[7]Associação Brasileira de Mulheres de Carreira Diplomática. (n.d.). Mulheres Diplomatas. Récupéré le 4 juillet, 2024, de https://mulheresdiplomatas.org/quem-somos. Selon la présidente de l’AMDB, la diplomate Irene Vida Gala, la diversité au sein du MRE est vaste, englobant différentes origines géographiques, milieux économiques, et questions raciales. Au sein du ministère, des femmes noires ont formé un groupe au sein de l’association pour aborder les sujets à partir d’une perspective raciale. Pour l’AMDB, l’intersectionnalité est essentielle pour inclure des groupes comme les autochtones, qui ne sont pas encore représentés dans l’institution. De plus, cette intersectionnalité influence la promotion de la carrière diplomatique au Brésil. En 2023, pour le concours d’entrée dans la carrière diplomatique, l’Institut Rio Branco, l’école de diplomates, a mené une campagne intense dans toutes les régions, en particulier dans le Nord, où il y a peu de diplomates. Cet effort était une réponse directe à une demande de l’AMDB^[8]Brasília In Foco. (2024). Diplomatas brasileiras defendem paridade de gênero e mais diversidade no Itamaraty. Récupérée le 18 juillet, 2024, de … Continue reading.

La perspective des femmes au MRE est d’inclure les groupes historiquement absents de la diplomatie. Les femmes représentent moins d’un quart des fonctionnaires de carrière et cherchent une plus grande visibilité et à occuper ces espaces. L’AMDB veut diriger cet effort avec d’autres associations, comme celle des personnes handicapées, la communauté LGBTI+ et le groupe Diplomatie et Négritude. L’objectif est de promouvoir un travail inclusif, enrichissant le ministère par la diversité, la représentation des femmes et l’inclusion de tous les groupes minoritaires^[9]Brasília In Foco. (2024). Diplomatas brasileiras defendem paridade de gênero e mais diversidade no Itamaraty. Récupérée le 18 juillet, 2024, de … Continue reading.

Pour atteindre leurs objectifs, l’AMDB s’engage résolument à instaurer la parité de genre au sein de l’Itamaraty et au-delà, dans toute la société brésilienne. Leur plan d’action inclut la création d’un Forum de Dialogue pour la Parité de Genre au sein du MRE, doté d’objectifs précis et d’une redevabilité quant aux résultats. L’AMDB réclame également des critères de promotion et d’affectation internationale plus transparents pour favoriser une représentation accrue des femmes à des postes de leadership et pour briser le plafond de verre existant^[10]Associação Brasileira de Mulheres de Carreira Diplomática. (n.d.). Mulheres Diplomatas. Récupéré le 4 juillet, 2024, de https://mulheresdiplomatas.org/quem-somos.

Des partenariats sont établis avec d’autres associations de femmes dans la fonction publique et la société civile, assurant ainsi une avancée cohérente de l’agenda de genre pour le bénéfice de toutes les femmes. L’AMDB recommande que les cadeaux protocolaires du Itamaraty soient achetés auprès de communautés de femmes et d’artistes, sous le label « Le Brésil promeut ses femmes », illustrant leur approche intersectionnelle et inclusive. Ces actions collectives ont pour ambition de métamorphoser le paysage diplomatique brésilien en un modèle d’égalité et de diversité, représentant ainsi les valeurs fondamentales d’une société moderne et inclusive^[11]Associação Brasileira de Mulheres de Carreira Diplomática. (n.d.). Mulheres Diplomatas. Récupéré le 4 juillet, 2024, de https://mulheresdiplomatas.org/quem-somos.

En Argentine, la Red de Diplomáticas Argentinas (RedDA; Réseau de diplomates argentines) a été fondée en 2020 pour défendre les droits et la représentation des femmes dans le domaine de la politique étrangère. Sur les 1 000 diplomates de carrière au ministère des Affaires étrangères cette année, seulement 357 (35,7%) sont des femmes, un déséquilibre que la RedDA cherche à rectifier. Elle proteste contre le fait que les femmes diplomates sont souvent reléguées à des postes dans des ambassades périphériques aux centres de pouvoir, tandis que les hommes occupent majoritairement les postes de plus haute importance, un fait commun à de nombreux pays de la région. La pétition remise au ministre des Affaires étrangères de l’époque, Felipe Solá, mettait l’accent sur la nécessité d’une parité effective dans les postes de direction et de hiérarchie. Ainsi, la RedDA se mobilise pour que les femmes diplomates obtiennent l’égalité réelle dans les postes de direction et de hiérarchie, en appliquant des critères égaux et transparents pour l’accès à la carrière, en tenant compte de l’ancienneté. Les membres de la RedDA soulignent également les défis spécifiques liés à la maternité auxquels font face les femmes diplomates, et tenter de porter ces débats au niveau institutionnel^[12]Infobae. (2020, February 24). Cancillería: Crearon una red de diplomáticas argentinas para reclamar por la paridad de género. Récupéré le 4 juillet, 2024, de … Continue reading^[13]Diplomáticas Argentinas. (n.d.). Instagram page. Récupérée le 17 juillet, 2024, de https://www.instagram.com/diplomaticasargentinas/.

Pour contextualiser précisément le scénario auquel la RedDA fait face, il convient de noter que, selon une enquête de 2020 menée par la RedDA, seulement 25 % des ambassadeur·ices sont des femmes, alors que la plupart des femmes diplomates occupent des postes moins élevés dans la hiérarchie. Cette disparité montre une limitation persistante pour les femmes dans la diplomatie argentine^[14]Red de Acceso al Aborto Seguro Argentina (RedAAS). (n.d.). Mujeres diplomáticas hacen una petición por la paridad de género en la carrera. Récupéré le 4 juillet, 2024, de … Continue reading. En parallèle à ces efforts, en juin 2024, le gouvernement a supprimé le Ministère des Femmes, du Genre et de la Diversité, département chargé de la protection contre les violences de genre dans l’ancienne administration ^[15]Ministerio de las Mujeres, Géneros y Diversidad de la Nación Argentina. (n.d.). El Ministerio de las Mujeres, Géneros y Diversidad de la Nación en números. Récupéré le 8 juillet, 2024, de … Continue reading. Cette décision s’inscrit dans le cadre du mandat du président Javier Milei de « réduire la taille de l’État et d’éliminer les agences politisées »^[16]Ministerio de Justicia y Derechos Humanos de la Nación Argentina [@jusgobar]. (n.d.). Tweet. Twitter. Récupérée le 18 juillet, 2024, de https://x.com/jusgobar/status/1798884359727894867. Cela représente un nouveau recul en matière de genre en Argentine. En outre, la décision récente du président Javier Milei de rendre obligatoire l’utilisation d’un langage masculin exclusif dans les relations extérieures a suscité une forte critique de la part de la RedDA. Cette mesure, qui interdit l’utilisation de formes féminines comme « embajadora » (ambassadrice) ou « ministra » (ministre) au Ministère des Affaires étrangères, est perçue comme un recul dans la lutte pour l’égalité des genres et l’inclusion^[17]Público. (2024). Milei prohíbe hablar a las embajadoras. Récupéré le 4 juillet, 2024, de https://www.publico.es/internacional/milei-prohibe-hablar-embajadoras.html. Malgré les avancées telles que la présence d’une ministre de l’environnement, Diana Mondino, ces développements récents soulignent les défis persistants pour les femmes dans la diplomatie argentine sous l’administration de Javier Milei^[18]Público. (2024). Milei prohíbe hablar a las embajadoras. Récupéré le 4 juillet, 2024, de https://www.publico.es/internacional/milei-prohibe-hablar-embajadoras.html.

Au Paraguay, pays qui abrite déjà un Ministère des femmes au sein de son gouvernement, la Red de mujeres paraguayas en diplomacia y relaciones internacionales (Réseau des femmes paraguayennes dans la diplomatie et les relations internationales), créée en 2021, représente un espace crucial pour les femmes engagées dans le corps diplomatique, l’administration publique, et d’autres secteurs, y compris les organisations internationales^[19]Ministerio de Relaciones Exteriores de Paraguay. (n.d.). Crean espacio para mujeres en diplomacia y relaciones internacionales. Récupéré le 4 juillet, 2024, de … Continue reading.

De cette façon, l’objectif principal de cette entité est de promouvoir les intérêts spécifiques des femmes paraguayennes dans le domaine de la diplomatie et des relations internationales, en mettant en lumière leurs contributions souvent invisibles. Pour atteindre ces objectifs, la Red cherche à établir des alliances de coopération à l’échelle nationale et internationale avec d’autres organisations partageant des missions similaires. Cela comprend le soutien actif à la participation des jeunes femmes dans les carrières diplomatiques à travers des initiatives de mentorat structurées^[20]Dirección General de Migraciones de Paraguay. (n.d.). *Mujeres representantes de los tres poderes del Estado participaron en acto de conmemoración por el Día de la Mujer Paraguaya*. Récuperé le … Continue reading.

En République dominicaine et au Salvador le même type d’association existe – l’Asociación de Mujeres Diplomáticas de RD (l’Association des femmes diplomates de la RD) et la Red de Mujeres en el Servicio Exterior de El Salvador (Réseau des femmes du service extérieur du Salvador). Cependant, elles ne communiquent pas beaucoup leurs activités et les informations spécifiques sur leurs actions ne sont pas abondantes.

La Red de Salvador est aussi un espace de dialogue et de collaboration pour développer des initiatives concrètes en faveur de l’égalité des genres et de l’autonomisation des femmes fonctionnaires du ministère des affaires étrangères dans l’exercice de la diplomatie^[21]Ministerio de Relaciones Exteriores de El Salvador. (n.d.). Cancillería lanza red de mujeres en el servicio exterior. Récupéré le 18 juillet, 2024, de … Continue reading. De plus, en 2024, les femmes qui travaillent dans le service extérieur de Salvador ont dénoncé d’abus et des violations des droits des femmes travaillant dans le service extérieur du ministère des Affaires étrangères, principalement dans les postes consulaires aux États-Unis et en Europe. Des demandes d’enquête ont été adressées à deux reprises au président Nayib Bukele, mais il n’y a toujours pas de position définitive de la présidence sur la question^[22]Mujeres en el Servicio Exterior [@MUJERES_SERV_EX]. (2023, October 31). Texto du tweet. Twitter. https://twitter.com/MUJERES_SERV_EX/status/1783954656047120432^[23]El Salvador. (2024, July 16). Denuncia acoso hacia mujeres en el servicio exterior. El Salvador.com. Récupéré le 18 juillet, 2024, de … Continue reading.

Enfin, l’Asociación de la République dominicaine initie des actions similaires à celles des autres associations et réseaux enorganisant des panels et des événements dédiés à la promotion de la présence des femmes dans le secteur de la diplomatie. Ces initiatives incluent la participation de femmes diplomates venues d’autres pays d’Amérique latine, favorisant ainsi les échanges et le renforcement des réseaux régionaux dans le domaine diplomatique et de genre^[24]Asociación de Diplomáticos de la República Dominicana (ADIDOM). (n.d.). Twitter. Récupéré le 18 juillet, 2024, de  https://twitter.com/adidomrd.

Les initiatives et les actions des associations de femmes diplomates

Compte tenu de l’évolution positive de ces associations de femmes diplomates, malgré des environnement parfois dégradés au niveau des droits des femmes, elles ont gagné en force et en importance au cours des dernières décennies, se consolidant dans les années 2010 et 2020 dans la région. Ces associations des femmes diplomates permettent également d’échanger sur la préparation d’études, de réaliser des rapports, des recherches et de la collecte de données sur les femmes en diplomatie. Des pratiques cruciales pour évaluer et promouvoir leur progression au sein des carrières diplomatiques, à la fois à l’intérieur des institutions et sur la scène internationale. Les études documentent la sous-représentation des femmes aux postes de décision dans les ministères des Affaires étrangères et analysent les obstacles structurels et culturels qui limitent leur accès aux promotions et aux postes clés. Ces analyses sont essentielles pour plaider en faveur de politiques et de programmes visant à renforcer l’inclusion des femmes et à promouvoir l’égalité des genres.

De plus, les associations de femmes diplomates développent des programmes et des initiatives de mentorat et de promotion de la carrière de diplomates aux femmes, comme le Mentorat Mônica de Menezes Campos au Brésil. Cette initiative, promue par des diplomates noir·es pour les candidat·es noir·es à l’admission à la carrière diplomatique au Brésil, célèbre la mémoire de la première femme noire à entrer dans le service diplomatique par concours dans le pays, Mônica de Menezes Campos^[25]Associação Brasileira de Mulheres de Carreira Diplomática. (n.d.). Preparação para o concurso CACD. Récupéré le juillet 8, 2024, de https://mulheresdiplomatas.org/preparação-concurso-cacd. En Argentine, bien qu’il n’y ait pas de places réservées spécifiquement aux femmes, le pays a commencé à offrir des bourses aux candidat·es aspirant à entrer dans la carrière diplomatique argentine pour la première fois en 2024, permettant ainsi aux femmes une nouvelle opportunité d’entrer dans le service extérieur^[26]Boletín Oficial de la República Argentina. (2024, May 7). Disposición 192/2024. Récupéré le 16 juillet, 2024, from https://www.boletinoficial.gob.ar/detalleAviso/primera/306865/20240507. Ces initiatives offrent un soutien fondamental et des conseils personnalisés pour leur développement professionnel. Ces programmes ont permis aux femmes de partager leurs expériences, de se soutenir mutuellement dans des situations difficiles et de se positionner collectivement contre l’injustice et les discriminations.

L’articulation avec la société civile est une autre dimension importante. Les organisations de la société civile ont joué un rôle actif en intégrant leurs revendications dans les politiques internationales pour les femmes. Elles ont plaidé pour des mesures concrètes visant à améliorer les conditions des femmes dans la diplomatie et à renforcer leur participation aux processus décisionnels mondiaux. Par exemple, au Brésil, le Conseil national des droits de la femme (CNDM), créé en 1985 peu après la fin de la dictature militaire, existe encore comme un organe composé d’organisations de femmes de la société civile brésilienne qui assure la liaison entre la société civile et le gouvernement. Au niveau international, à travers le CNDM, la société civile féministe a l’opportunité de participer aux décisions et actions de politique étrangère, ainsi qu’à des délégations et forums internationaux traitant de la thématique de genre^[27]Pitanguy, J. (2018). Celebrando os 30 anos da Carta das Mulheres Brasileiras aos Constituintes. Escola da Magistratura do Estado do Rio de Janeiro-EMERJ TRIBUNAL DE JUSTIÇA DO ESTADO DO RIO DE … Continue reading.

Ces efforts ont contribué à promouvoir une diplomatie plus inclusive et à créer des environnements professionnels où les femmes peuvent travailler et prospérer, influençant ainsi positivement les politiques étrangères et les relations internationales dans les pays latino-américains.

Malgré les obstacles, une diplomatie féministe

La deuxieme partie de ce dossier explore les différents aspects de genre et de diplomatie dans la région latino-américaine, en mettant en lumière les principaux jalons et évolutions dans ce domaine au cours des dernières décennies, les défis majeurs, ainsi que des recommandations dans ce contexte. Elle examine comment les avancées en matière d’égalité des genres ont influencé les pratiques diplomatiques et les politiques extérieures, tout en identifiant les obstacles persistants qui entravent encore une pleine inclusion des femmes dans la diplomatie. De plus, l’article propose des stratégies concrètes pour surmonter ces défis, notamment par la mise en place de formations spécialisées, le soutien accru aux réseaux de femmes diplomates, et l’adoption de politiques institutionnelles visant à garantir une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes dans toutes les instances décisionnelles.

Les propos contenus dans cet article n’engagent que l’autrice.

Pour lire la deuxième partie de cet analyse, cliquez ici.

Pour citer cet article: Sofia Rocco Stainsack Rocha, “L’engagement des femmes dans la diplomatie latino–américaine et leurs associations institutionnelles au sein des ministères des Affaires étrangéres (1/2)”, 12.08.2021, Institut du Genre en Géopolitique, igg-geo.org/?p=20230